Maninkari - Arch of the aorta

Publié le 10 Janvier 2024

Maninkari - Arch of the aorta
  Deux Persans à Paris

   Maninkari ? c'est le duo formé par les frères Charlot, Olivier au cymbalum, santour, percussions sur cadres et synthétiseurs, Frédéric aux synthétiseurs, violoncelle (effets), alto (joué et modifié avec Kontakt, sorte d'échantillonneur permettant d'accéder à un grand nombre d'instruments virtuels). Le titre de leur dernier album est un hommage au premier album de Fad Gadget, Fireside Favourites (1980), dont le dernier morceau est titré "Arch of the aort". Ils apprécient l'excellente recherche de sons de synthétiseurs qui marque ce disque.

   De disque en disque, ils construisent un univers décalé à base de boucles de synthétiseurs et de drones, de percussions obsédantes et d'une myriade d'instruments aussi bien traditionnels que résolument contemporains. Entre musique électronique et musique orientale, ils inventent une musique "tribale", comme ils aiment à dire. Ces deux Parisiens sont de partout où la musique exalte et enlève, mystique par nature. Je les vois comme deux Persans égarés à Paris, concoctant de savants mixages comme autant de viatiques pour conquérir l'au-delà en échappant aux contingences terrestres.

   Ils ont sur ce nouveau disque le renfort vocal de Claudie Pouget, sur les titres 1 et 6 : j'avoue n'avoir pas discerné sa voix dans les cathédrales sonores que sont les compositions de ces deux Inspirés, mais les compositeurs précisent que ce ne sont que de très brefs échantillons, mixés assez bas ou recouverts par des réverbérations, ce qui me rassure un peu sur l'état de mes précieuses oreilles !.

    Dès "Les eaux matinales", on est entraîné dans un flux irisé rythmé irrégulièrement par une forte percussion. Les eaux se mêlent en un ondoiement de synthétiseurs et d'autres instruments fondus dans le faisceau sonore. "ephil-iodic" se caractérise par un santour (ou/et cymbalum, les deux sont des cithares sur table) surplombant la masse tourbillonnante parcourue de courants. Le morceau suivant, "le parfum qui blesse", prend la forme d'une transe quasi soufie incantée par cithare et tambour, parcourue de bourdonnements frémissants qui se rapprochent de sirènes d'usines sur la fin. Puis suit "le temps médiéval", hymne grandiose à l'orgue tordu en fines torsades radieuses, le tambour la découpant en sections inégales. J'aime chez Maninkari cette dimension incantatoire, solennelle et folle, ce glissement dans un ailleurs de splendeurs ! "aortic arch I" est plus oriental, saturé de résonances, comme si on se trouvait dans un caravansérail de musiciens déchaînés, emportés et vaporisés dans une traînée d'orgue transcendantale envahie de voix fantomales. MAGNIFIQUE ! Et la deuxième partie de "Les eaux matinales" lave ces envolées par une plongée en eaux profondes, doucement grondantes, qui s'arrêtent mystérieusement de couler avant de reprendre le cours inexorable d'un chant trouble. Avec la deuxième partie de "aortic arch", l'artère charrie un flot d'esprits, de voix irréelles, à peine surmonté de fines traînées de cordes...

   Sept pièces pour échapper au culte des Idoles !

Parution numérique seulement en octobre 2023 / 7 plages / 31 minutes environ

Dessin de Frédéric Charlot en couverture.

Pour aller plus loin

- album en écoute et en vente sur bandcamp :

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