Julius Aglinskas (1) - blue dusk
Publié le 17 Février 2025
Découvert hier en rédigeant l'article consacré au disque de piano de Marta Finkelštein, le compositeur lithuanien Julius Aglinskas (né en 1988) m'impose un retour en arrière. Il écrit de la musique comme on respire, sans se soucier d'idéologies ou de causes, ni de théories musicales. De la musique qui touche l'âme, en profondeur. blue dusk est sorti en 2023, interprété par l'Ensemble britannique Apartment House, un ensemble de chambre lié au label Another Timbre, avec plus de quarante albums à son actif (Olivier Messiaen, John Cage, Julius Eastman, etc.).
Deux violons, un alto, un violoncelle, une guitare électrique, et un piano en position de semi soliste par moment. Plus un traitement audio supplémentaire.
Blue dusk (Crépuscule bleu ), s'il se présente en deux parties, forme un tout. C'est comme une immense élégie, très douce, sans cesse reprise en canon, un dialogue entre deux trios : cordes caressantes (violons et alto) face au piano, à la guitare électrique et au violoncelle, qui leur répondent posément en laissant résonner leurs notes. La pièce suit un ample mouvement ondulatoire de flux et de reflux, de long crescendo et de quasi disparition. On pourrait parler de minimalisme, de musique répétitive, mais d'une suavité inaccoutumée dans ces musiques. Que l'œuvre soit interprétée par un ensemble britannique n'est pas anodin. Il y a quelque chose de très anglais dans cette langueur. Blue dusk fait écho pour moi à The Sinking of the Titanic de Gavin Bryars ou encore à des pièces de Richard Skelton comme la sublime "Of The Sea" dans Verse of Birds (2012). Bien sûr, la tonalité ambiante n'est pas sans évoquer non plus Brian Eno et sa galaxie. Le piano, d'un calme surnaturel, clôt la première partie.
Et nous replongeons dans cet océan mélodieux qui semble retenir ses vagues pour mieux offrir ses demi-teintes alanguies. Tout est comme amorti, enveloppé d'un réseau d'harmoniques arrondies. La mélancolie n'est pas souffrance dramatique, c'est à peine une tristesse vague, un penchant à la rêverie, une manière de s'abandonner au temps, de s'allonger dans la lumière diffuse d'un crépuscule immensément distendu. Si, parfois, la musique semble se déchirer, elle se voile immédiatement, s'enroule dans des volutes d'une envoûtante lenteur, ponctuée par le piano en sourdine dans des graves veloutés. En l'absence de toute rythmique proprement dite, la texture de plus en plus serrée des boucles et variations crée un balancement hypnotique au charme irrésistible.
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Ci-dessous une très belle version, qui n'est pas exactement celle du disque (elle est plus courte).
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Une musique de chambre ambiante absolument sublime ! Un chef d'œuvre pour disparaître dans la Beauté de crépuscules infinis...
Paru fin mars 2023 / Autoproduit (Vilnius, Lithuanie) / 2 plages / 36 minutes environ
Pour aller plus loin
- album en écoute et en vente sur Bandcamp :