Fani Konstantinidou - Undertones
Publié le 7 Octobre 2025
Compositrice grecque installée aux Pays-Bas, Fani Konstanttinidou utilise des environnements sonores urbains et ruraux combinés à des instruments électroniques conventionnels et de conception personnelle. Undertones, à l'origine pour quatre canaux, a été revu pour le format stéréo. De même, les enregistrements de terrain intégrés à la pièce, en principe variables à chaque exécution dans un lieu différent, ont été choisis dans plusieurs lieux d'Amsterdam. Les interprètes, invités à réagir aux enregistrements de terrain demandés à l'un d'entre eux, contribuent à la structure de la composition, qui peut-être considérée comme semi-improvisée. On pourra ici entendre incorporés des sons de l'orgue du Concertgebouw (sans public), du Utopa Baroque Organ à partir de l'intérieur de l'instrument (sans public également), et de l'extérieur depuis le toit du Stedelijk Museum. La pièce associe les percussions idiophones de Iakovos Pavlopoulos et l'électronique de la compositrice. Un disque des Séries Contemporaines (Contemporary Series) du label d'Amsterdam, décidément à l'affût de ce qui se compose de mieux.
Sur un fond ondulant de bourdons et un crépitement, un bol chantant (probablement). Des invasions texturées rivalisent avec la percussion dans un jeu de résonances prolongées. Frottis de cymbales, de métallophones, montée de sons lourds, créent un climat mystérieux. La musique de Fani Konstantinidou est rituelle, solennelle. Entre vagues profondes et notes percussives précises se crée une densité habitée, dans laquelle des fantômes de voix peuvent se lover, comme à la fin de la première partie ou au début de la seconde, où l'on croit entendre des voix courbes, plaintives. Tissée de délicats frémissements percussifs et d'une aura électronique mouvante, chaque pièce tisse sa broderie, comme le froissement d'un feuillage, ce serait comme le murmure des chênes de Dodone, leur bruissement aux intrications innombrables. Avec des phases de calme extatique, la bouleversante venue d'un au-delà sonore majestueux, d'une radieuse beauté comme dans la troisième partie. On croit parfois avancer dans une jungle fourmillant de sons minuscules, d'épines sonores, on dérange des divinités assoupies depuis des siècles au fond de grottes qui se mettent à grelotter, à racler leurs poumons ankylosés par des pétrifications immémoriales. Et c'est l'approche d'un temple inconnu, entouré d'une enveloppe de gongs, de sinueuses lianes d'orgue ; il faut déblayer les abords, enlever les gravats, pour que résonnent les sons purs dans leur gangue de tumultes accumulés. Undertones, c'est à voix basse, dans l'ombre des nuances, que l'on parvient au cœur du chaos, dans la seconde moitié de la quatrième partie, extraordinaire. Qu'y a-t-il au centre du fouillis, derrière ces rideaux bruissants d'une musique devenue épique ?
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Une fascinante plongée électroacoustique aux alentours des arcanes, méticuleusement façonnée dans de splendides clairs-obscurs.
Paru le 26 septembre 2025 chez Moving Furniture Records / Contemporary Series (Amsterdam, Pays-Bas) / 4 plages / 37 minutes environ
Pour aller plus loin
- album en écoute et en vente sur Bandcamp :
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