Publié le 29 Mars 2007

Efterklang, Under Byen / Sofia Gubaidulina : Sept mots sous des arbres géants

(Article remis en page + illustrations sonores / Émission du 25/03/07)

Douces collines, âpres collines que le vent balaye...Où sont les chevaux fous poudrés d'écume et d'algues, les arbres géants tordus par le vent ? Les plaintes des fougères se mêlent aux voix des marins ivres d'amour. Eli, Eli, lama sabachtani ?


Efterklang : Falling horses (piste 1, 7' 10)
                       Hands playing butterfly (p. 3, 4' 29)
          extraits de Under giant trees (The Leaf Label, 2007), mini-album qui sort début avril. Le premier disque de ce groupe danois basé à Copenhague, Tripper, enregistré en 2003 et paru en 2004, a été très bien reçu. Formation à géométrie variable autour d'un noyau de cinq musiciens et d'un réalisateur de film, elle allie cordes et cuivres, piano, percussions, voix ou choeur, une touche d'électronique pour construire une musique au lyrisme ample, rêveuse et lente. Des titres comme Falling horses ou Towards the bare hill ne sont pas sans évoquer la musique bouleversante de Matt Elliott.
   La pochette de l'album, si colorée, si naïve, reflète  la polyphonie chorale et chaleureuse d'une véritable musique de chambre.
La photographie trouvée sur leur site, en accord avec leur univers monochrome, à la fois lumineux et désolé, me permet de faire la transition avec une compositrice au mysticisme saisissant.

Efterklang, Under Byen / Sofia Gubaidulina : Sept mots sous des arbres géants

Sofia Gubaidulina : Sieben Worte (p.1 à 7, environ 35'), 1982, pour bayan, violoncelle et cordes.
    extrait de Sieben Worte/ Zehn Präludien/ De Profundis (ECM New Series, 2002)
              
In Erwartung (p.12, 14' 19), 1994, pour quatuor de saxophones et six percusionnistes.

    extrait de Mysterious morning (Alpha, 2001) Née en 1931 dans la République Tatare (URSS), Sofia Gubaidulina, qui a étudié la composition aux conservatoires de Kazan et de Moscou, a très vite été jugée hétérodoxe par le milieu musical soviétique. Dimitri Chostakovitch lui a toutefois conseillé de persister dans sa voie. Co-fondatrice d'un ensemble qui improvisait sur des instruments traditionnels et rituels russes, caucasiens et asiatiques rares, elle a pu personnaliser des techniques musicales contemporaines et se forger un style propre, éloigné de tout dogmatisme. Autorisée à voyager à l'Ouest pour la première fois en 1985, elle a obtenu une reconnaissance internationale. Depuis 1992, elle réside principalement près de Hambourg. Dans Sieben Worte, elle s'inscrit dans le sillage des rares compositeurs qui ont osé se confronter à la mise en musique des sept dernières paroles du Christ en croix, comme Heinrich Schütz ou Joseph Haydn. Profondément religieuse, elle a tenté de faire exprimer aux instruments ce qui ne peut être ni chanté, ni dit, en écartant tout jeu virtuose ou toute pratique concertante à l'ancienne. Le violoncelle symbolise ce qui est "haut", tandis que le bayan, accordéon de concert russe qu'elle a contribué à perfectionner, symbolise le "bas", le terrestre humain : ils dialoguent, se fondent pour rendre sensible la double nature du crucifié. Musique d'une intensité déchirante, traversée de moments de beauté illuminée, que les cordes emportent de leurs battements d'ailes.
    Le second morceau, interprété par le quatuor de saxophones Habanera, fait alterner violence et sérénité, "dans l'attente" du jour de la colère : Dies irae étonnant par la place des percussions, qui entretiennent un climat de mystère et de magnificence. Décidément, ce disque Mysterious morning s'avère indispensable !
         
Under Byen : Mere af det samme / Liste over sande ve / Palads (p.8 - 10 -11, 9')
         extraits de Samme Stof Som Stof (Telescopic / Discograph, 2006) Un deuxième groupe danois pour finir l'émission. Entre rock épais, avec dérapages frénétiques, et envolées instrumentales élaborées où se rejoignent piano, violoncelle, clarinette, orgue et la voix délicieuse de
Henriette Sennenvaldt, voilà un nouvel exemple de la vitalité et de l'originalité de la scène danoise. Sur leur site officiel, vous pouvez téléchargez quelques morceaux.

                                    

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Rédigé par dionys

Publié dans #Hybrides et Mélanges

Publié le 19 Mars 2007

Un titre cut-up pour un programme qui gravite autour de Harold Budd, compositeur californien aussi discret qu'essentiel.
Kalylivedub : Blizzar (piste 8, 4' 38)


                          How to be late (p.11, 8' 48) avec Erik Truffaz, trompette

        extraits de On stage (Pias, 2007), quatrième album d'un groupe qui s'est d'abord affirmé sur scène depuis sept ans. Guitare, machines, claviers, percussions et programmations, basse, ce collectif de cinq français vous embarque dans une musique puissante, nerveuse, habitée, un dub industriel et électronique sur lequel Erik Truffaz vient surfer avec brio pour les deux derniers morceaux de l'album. Uzul Prod, récemment diffusé, appartient à la même famille.


 

Fuminori Tanada : Mysterious Morning II (p.7-8, 8' 59) par le Quatuor de saxophones Habanera

         extrait de Mysterious Morning (Alpha, 2001), un disque que j'avais laissé de côté et auquel je trouve maintenant beaucoup d'attraits. La compositrice explore l'intérieur du son par des micro-intervalles, crée des vagues sonores aux sinuosités, fluctuations mystérieuses bien soulignées par le titre.
Harold Budd / Brian Eno : First light (p.1, 7' 06)
                            Not yet remembered (p.6, 3' 50)
                                           The chill air (p.7, 2' 14, diffusé après Guidoni, avant les mélodies françaises)
          extraits de The Plateaux of mirror (Virgin, 2004). Sorti originellement en 1980, c'est la première rencontre miraculeuse entre le piano acoustique ou électrique d'Harold et les autres instruments et traitements du sorcier Brian, Maître des studios. Disque-culte, c'est un chef d'oeuvre de sérénité. Réverbérations nacrées, incantations murmurées, un hymne à la beauté fragile. Plus rien n'existe que ces irisations sonores déployées dans l'espace infini à l'aube éternelle du cosmos.
Jean Guidoni : Comme dans un ballet de Pina Bausch (p.2, 3' 02)
                             Fatal (p.5, 3' 22) extraits de La pointe rouge (Wagram, 2007, sortie en avril). Rarissime incursion dans le domaine de la chanson française : la voix est belle et bien placée, les textes intelligents, l'accompagnement sans grande originalité, mais bien enlevé sur quelques titres. On rêve d'une association avec ...Noir Désir ? Et pour continuer, quelques...

Mélodies françaises : Après un rêve (p. 6, 2' 55 de Romain Bussine / Gabriel Fauré)
       Invitation au voyage (p. 4, 3'  de Charles Baudelaire / Henri Duparc) Ce dernier titre est l'une des réussites de cet album qui ne manque pas de charme, à paraître fin mars chez Diese Records. Si l'on peut regretter que la musique, parfois, l'emporte sur les voix fluettes et délicieuses de certaines interprètes, c'est toutefois un bel hommage à une grande époque de la musique française.


 
Autour d'Harold Budd : Mysterious evenings après un rêve not yet remembered (de Kalylive dub aux Mélodies françaises )

Harold Budd : Bell tower (p.1, 2' )                          

                           Campanile (p.2,  3' 45)
                            The Rose (p.3, 3' 26)
                 extraits de La Bella vista (Shout ! Factory, 2003)

    Enregistré d'abord à son insu à l'instigation de Daniel Lanois lors d'une soirée à Los Angelès chez ce dernier, puis publié avec son accord après avoir consenti à une deuxième séance , Harold se laisse aller à son penchant introspectif, méditatif. Neuf courtes pièces, une dernière d'une dizaine de minutes, suffisent à nous dépayser. Le piano Steinway chante les échos assourdis du royaume hanté par le léopard des neiges : ah ! puissance de suggestion des titres...

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Rédigé par dionys

Publié dans #Hybrides et Mélanges

Publié le 15 Mars 2007

  Teknic Old Skool :   Arcold (piste 5 / 6' 10)

                                    Stop crying (p. 9 / 3' 58)
                                           (sans titre, Such prod, 2006)

Peter Ives, David Aknin Aka Akninganing, Robin Notte et Charly Sy Aka Unklebenz sont parisiens sous leurs pseudos, instrumentistes "old skool" avec leur basse, leur violoncelle et leur Fender rhodes, mais voilà, ils jouent plutôt de la drum'n bass, avec un DJ, des scratchs et des synthétiseurs ; ça ressemble aussi à un soul-jazz électro improvisé, à une pochade bourrée d'énergie qui part un peu dans tous les sens et c'est furieusement réjouissant à la longue, c'est pourquoi les revoilà dans l'émission ! Baudelaire et quelques autres se retrouvent les otages d'un collage très slammé, "Pirate", second titre de l'album qui donne le ton : enivrez-vous sans cesse...Les voix d'Irène Morel, M'tiss apportent un contrepoint chaleureux aux rappeuses voix masculines.
Premier CD du quatuor Ethel

Premier CD du quatuor Ethel

Ethel : Be-in (p.9 / 8' 51), pour clarinette basse, de  Evan Zyporin
                      (sans titre, Cantaloupe 2003)
 
   Ce jeune quatuor new-yorkais célèbre toutes les nouvelles musiques avec fougue, dépoussiérant l'image du quatuor à cordes comme le fait si magistralement depuis plus de vingt ans le Kronos Quartet. 

    On reparlera de ces musiciens.

Ci-dessous en fausse vidéo, un très beau titre du compositeur Phil Kline. C'est la première partie d'un cycle de quatre pièces.

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Publié le 15 Mars 2007

(Article remis en page + illustrations sonores / Proposition du 11/03/07, première partie)

Phelan Sheppard : The Plantagenet whore (piste 6 / 1' 39)
                                     Oriental star       (p.7 / 6' 05)
                                     Parachute seeds (p.8 / 2'18)
         extraits de Harps old master (Leaf label, 2006)

  Sous leurs propres noms associés, Keiron Shelan et David Sheppard, - déjà membres de State Rive Widening, groupe qui a trois albums à son actif, et de la formation Ellis Island Sound, signent un album superbe et singulier, l'un des disques du moment (voire la pochette dans l'article du 23 février). Les mélodies sont envoûtantes, volontiers cycliques, tissées de claviers parmi lesquels on retrouve les harpes du titre, de guitares acoustiques, xylophone, percussions,  tous joués par le duo, auxquels il faut ajouter le violon et l'alto de Josh Hillman, du goupe The Willard Grant Conspiracy,  la voix de la chanteuse espagnole Ines Naranjo sur deux titres, la trompette, le moog bass et les machines de Guy Fixsen. Un soupçon de sonorités électroniques achève de donner à l'ensemble un soyeux rêveur, une musicalité enchanteresse qui nous plonge dans les méandres brumeux du temps. David Sheppard, également journaliste du magazine Mojo, devrait publier dans le courant de l'année une biographie de... Brian Eno !
Phelan Sheppard / Hommage à Hans Otte : résonances cycliques

Hans Otte : Partie V (p.5 / 5'30)
                      Partie VI (p.6 / 3'42)
                      Partie VII (p.7 / 11'25)
         extraits de Das Buch der Klänge
         Piano : Herbert Henck
(ECM New Series, 1999)      
              orient : occident (p.2 / 14'28), pour hautbois, clarinette et bande magnétique
      extrait de maximum : minimum / orient : occident
       (Pogus Productions, 2005)

  Né en 1926, Hans Otte a étudié en Allemagne, en Italie et aux Etats-Unis, a été titulaire de plusieurs bourses et a vu son oeuvre récompensée par plusieurs prix de composition. Il a été le directeur de la musique à Radio Brême de 1959 à 1984. Pianiste, il interprète ses oeuvres partout dans le monde. Il collabore aussi à des mises en scènes expérimentales associant le son, la langue, l'image et le geste.Son cycle pour piano, Das Buch der Klänge, "Le Livre des Sons" est dédié à "tous ceux qui veulent être tout près des sons, et qui, à la recherche du son des sons, du secret de la vie tout entière, trouvent et retrouvent à résonner en eux-mêmes". Constitué de douze parties, d'une durée totale de plus de 70 minutes, celui-ci est construit en voûte, offrant une architecture équilibrée, aérée qui permet au piano de réfléchir le monde. Selon le compositeur , "le piano redevient instrument de résonance et de silence, révélant toutes ses possibilités techniques, dynamiques, teintes et sonorités". L' oeuvre propose une expérience d'écoute rare, entre minimalisme, musique ambiante et transcendantalisme, dont on sort régénéré : lent, vibrant, puissant ou tourbillonnant, pulsant, le piano irradie en nous ses ondes bienfaisantes.
  "orient : occident" est extrait d'un disque plus récent, moins facile d'accès sans doute en raison d'un morceau de plus de quarante minutes qui associe deux organistes à un environnement sonore, une mise en espace dont l'enregistrement ne peut rendre compte. Dans le titre proposé, on retrouve cette écoute si attentive des sons qui caractérise Otte et qui fait penser à la démarche ascétique, radicale, d'un Giacinto Scelsi. J'attends avec impatience l'enregistrement du Stundenbuch, "Livre d'heures", oeuvre monumentale en 48 mouvements achevée en 1998 après sept ans de travail, donnée en première la même année à Amsterdam.

Pour aller plus loin :

- l'intégrale du cycle Das Buch der Klänge par le pianiste Nicolas Horvath, en concert à Kiev

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Rédigé par dionys

Publié dans #Hybrides et Mélanges