Publié le 13 Janvier 2025
Le duo constitué par Yair Elazar Glotman et Mats Erlandsson existe depuis 2015. J'avais inclus dans ma liste des disques de 2017 leur Negative Chambers (paru chez Miasmah), disque pour lequel je n'avais pas écrit d'article. Je suis heureux de les retrouver, car je n'ai pas oublié ce disque. Et d'écrire à propos de Glory Fades ( La Gloire s'estompe... un beau titre !) que publie la maison de disques suédoise XKatedral.
Yair Elazar Glotman a une double formation de contrebassiste d'orchestre et de composition électroacoustique. Il a travaillé avec Jóhann Jóhannsson et a collaboré à plusieurs bandes sonores pour des films à grand succès comme Joker (2015) et À l'Ouest Rien de nouveau (2022, All Quiet On The Western Front). Sa musique a été enregistrée par des labels prestigieux tels que Deutsche Grammophon ou Bedroom Community. Mats Erlandsson, lui, vient plutôt de la scène électronique. Sons tenus, analogiques ou numériques, synthétiques, sont à la base de sa pratique musicale.
Pour Glory Fades, les deux musiciens développent une musique de chambre originale constituée côté acoustique par de la guitare pincée et frottée, de la cithare, des cloches, de la contrebasse, du violon et des percussions, et du côté électronique, par des traitements, le recours à des bandes manipulées et de la réamplification.
La cithare et la magnifique guitare acoustique donnent à Glory Fades une allure singulière, presque magique. Leurs riches résonances, le pincement de leurs cordes incantent cet ensemble de titres. Le premier, "At Ends", leur associe une électronique brumeuse de bourdons suaves. Le charme de l'album tient notamment dans cette alliance entre sons discontinus et sons continus. On est au seuil des musiques folkloriques par la beauté des mélodies, mais ces dernières prennent une tournure méditative, introspective, voire répétitive, dès le très beau "Copper Entries" (titre 2). "All Canals Dry" mêle raclements de fonds, motif hypnotique de guitare et bourdons enveloppants. C'est une musique en apesanteur, tapissée d'échos.
Écoutez le merveilleux "On the Folding of Leaves" (titre 4, Sur le pliage des feuilles) : on se promène dans un jardin enchanté, sur la pointe des pieds pour ne pas provoquer la disparition du mystère des rencontres sonores. Les notes s'égrènent, s'alentissent, gorgées de splendeur. Le court "Servitude", sombre et envoûtant comme un noir rituel, introduit "The Grinding Wheel" (titre 6, La Meule) et sa si belle mélodie à la guitare, ponctuée d'accords graves de contrebasse. La meule tourne, la guitare s'enroule en boucle inlassable dans un doux crescendo : quelle beauté forte et tranquille, lumineuse !
Un piano fantomatique perdu dans le brouillard hante "Pale Stars" (titre 7), traversé par d'étranges voix synthétiques, comme des instruments qui pleurent tandis que s'effondrent au ralenti des pans obscurs. Une élégie doucement déchirante avant le titre éponyme, le dernier, où l'on retrouve les cithares (et les guitares, comment les différencier ?), lâchant des accords espacés répétés tout au long d'une mélodie disloquée, exsangue : c'est un crépuscule, une agonie, animée de quelques frémissements percussifs...
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Entre splendeur enchantée et dérives au bord du désespoir, Glory Fades chante les beautés prenantes de la Mélancolie.
Paraît le 17 janvier 2025 chez XKatedral (Stockholm, Suède) / 8 plages / 44 minutes environ
Pour aller plus loin
- album en écoute et en vente sur Bandcamp :