musiques contemporaines - experimentales

Publié le 27 Novembre 2023

Erik K Skodvin - Nothing left but silence
À l'orée des lumières du silence  

   Norvégien installé à Berlin, Erik K Skodvin travaille le son, la musique, sous son nom ou sous celui de Svarte Greiner, en duo aussi sous le nom de Deaf Center (avec Otto A Totland). Concepteur graphique et photographe, on lui doit une centaine de couverture d'albums depuis les années quatre-vingt dix. Il dirige aussi le label Miasmah. De disque en disque, je suis devenu un inconditionnel de ce musicien rare, à l'écriture précise, voire minimale, mais dense, riche en émotions. Son univers est sombre, crépusculaire, c'est celui des limites, des bordures, du basculement possible dans un autre monde, celui des lumières enfouies sous les vieilles anxiétés. Une guitare, de la réverbération et un amplificateur, suffisent à ce rêveur obstiné pour débusquer la beauté désolée tapie parmi les ombres inquiétantes.

“Dreams of a new beginning” & "Entrance to the periphery”

“Dreams of a new beginning” & "Entrance to the periphery”

   Promenades hallucinées
au bord de la désolation

    Dès le premier titre, "Awaiting" (En attendant), on est saisi par cette musique économe, attentive. Une seule note sombre, comme une plainte à elle seule, répétée, équivaut à un thrène antique, soudain transfiguré à deux reprises par une brève explosion lumineuse, dont la réverbération prolongée, frémissante, dégage une lumière rase, magnifique, celle d'un incendie vu de très loin. " A silent moment in the periphery", qu'est-ce sinon une boucle obsédante, en flammes vives ? Le silence brûle, on dirait, avec des retraits sombres. C'est une musique idéale pour La chouette aveugle  (première publication en 1936) de Sadegh Hedayat, une vision surréelle presque insoutenable dans sa déréliction fantomatique, d'une beauté foudroyée, d'une douceur douloureuse.

   "Quiet states of anxiousness" semble un rituel inquiétant, le frémissement des cauchemars scandé par un tremolo de guitare et une percussion sèche ou une note isolée. Les marches solennelles, "Solemn Steps", se franchissent en rampant sur les réverbérations rasantes de la guitare balbutiante. Sans doute une vison d'au-dessus est-elle meilleure pour observer les lumières couchées dans les lointains. "Observing the lights from above" tente de s'élever pour que les lumières se dressent malgré les ombres, finissent par dessiner une fugitive silhouette au fusain noir de la nuit absolue. Erik K Skodvin saisit l'âme de la désolation dans ses boucles hypnotiques, raréfiées, réduites à quelques traînées persistantes. C'est la condition pour obtenir la lente récolte, "The slow harvest"(titre 6), dans un poudroiement trouble, dans l'étrange levée de sons percussifs au milieu d'un désert de poussières.

"A walk on the edge" est une nouvelle variation des titres 1 et 3, guitare sourde contre guitare plus lumineuse, nous sommes sur le bord, sur le fil, dans une tentative pour inventer l'envol en dépit des pesanteurs. Pour horizon chimérique, ce sont les "Dreams of a new beginning", tentatives de transfigurations lumineuses sur le fond fuligineux des angoisses persistantes. Et c'est une lente montée dans la splendeur lourde d'une fusion où la guitare se noie dans les réverbérations.

   Un disque magistral, sobrement, sombrement sublime, d'un bout à l'autre. Un des meilleurs albums de 2023 !

Paru en septembre 2023 chez sonic pieces (Berlin, Allemagne) / 8 plages / 40 minutes environ

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Publié le 9 Novembre 2023

Ivan Vukosavljević - Slow Roads

   Compositeur né en Serbie en 1986 et installé à La Haye (Pays-Bas) depuis 2014, Ivan Vukosavljević s'intéresse aussi bien aux guitares électriques, aux musiques bruitistes et électroniques qu'aux instruments occidentaux ou indiens, aux ensembles traditionnels... et aux orgues, d'où cet album qui rassemble huit pièces pour orgue solo à tempérament mésotonique [tous les tons sont égaux à une valeur médiane] à quart de comma [ le comma est un huitième de ton, à la limite du perceptible], tempérament faisant écho à la musique pour clavier de la fin du Moyen-Âge et de la Renaissance. Les pièces ont été enregistrées sur cinq orgues historiques différents, datant du début du XVIe au milieu du XVIIe siècle, situés dans des églises médiévales disséminées dans la campagne du nord des Pays-Bas. C'est une manière pour le compositeur de rendre hommage et de mettre en valeur une des cultures d'orgue les plus vivantes au monde, mais peu utilisée par la musique contemporaine.

Lents chemins vers l'Illumination

   Les titres renvoient souvent à la Bible ("Ladder" I et II, à l'échelle de Jacob ; "Psalm" sans numéro au livre des Psaumes ; "Ramum Olivae", le rameau d'olivier, à la fin du Déluge), mais "Echo"(titre 6), est inspiré de l'œuvre d'un célèbre organiste et compositeur néerlandais, Jan Pieterszoon Sweelinck 1562 - 1621), surnommé de son vivant L'Orphée d'Amsterdam, dont les œuvres sont à la jonction des musiques de la Renaissance et de la période Baroque. Le titre 5, "Porete", est un hommage à Marguerite Porete, mystique béguine et femme de Lettres, auteur d'un livre qui fit scandale, Le Miroir das âmes simples anéanties et qui seulement demeurent en vouloir et en désir d'amour, livre condamné par l'Église et qui lui valut d'être brûlée vive en Place de Grève à Paris en 1310. Quant au titre 2, "When You Are Able To Become The Patterns Of The Earth", s'il a des résonances bibliques, rien n'empêche de comprendre "pattern" comme un clin d'œil aux fameux « motifs » de la musique minimaliste dans la mesure où plusieurs compositeurs de ce courant ont beaucoup écouté de musique de la Renaissance...

    Ce qui surprend toujours dans la musique pour orgue, surtout des orgues historiques, c'est le souffle, le vent, l'impression d'être d'emblée ailleurs que sur terre. Que la première pièce soit titrée "The Ladder" (L'Échelle) n'est pas indifférent. On monte tout de suite, on surplombe, porté par l'air dans les tuyaux. La musique est pure diffusion dans l'espace, ascension douce à travers les nuages harmoniques. On est soulevé dans des flocons de ouate, toujours plus haut, c'est une extase d'une bienheureuse mollesse. Quelle belle entrée feutrée !

   L'orgue se fait flûtes pour le deuxième titre, "When You Are Able To Become The Patterns Of The Earth". Sonneries modestes, étayées de notes agglomérées au long vibrato, elles résonnent, rayonnent, pour se colorer vivement au fil des motifs, gagner en vigueur sans perdre de leur charme immatériel, d'une suavité angélique. "Triptych", aux boucles en canon, prend les allures d'un étonnant hymne minimaliste, sorte de feu d'artifice sonore en trois phases décalées que ne renierait pas un Steve Reich. Quant à "Ramum Olivae", c'est au contraire d'abord une humble salutation de la terre, des oiseaux, tout en courbures descendantes, avec ses chants sifflants et joyeux au milieu des buissons bourgeonnant de sons qui éclosent sur la fin.

   Avec "Porete", l'orgue se fait plus mystérieux, au plus près de bouillonnements intérieurs obsédants rendus par des variations serrées. Puis la pièce se jette dans les flamboiements grandioses d'une extase spiralée, aspirée par le Ciel : superbe évocation indirecte des états d'âme de la mystique et de son effusion dernière dans le bûcher. L'hommage à Sweelinck prend la forme comme d'une comptine, mais se change en une mélodie répétitive inlassablement reprise et variée, antienne envoûtante, écho du Paradis perdu...

   La deuxième échelle, "Ladder II", nous transporte dès les premières notes au plus haut. Pièce transcendante, elle marche au milieu des étoiles, dans le firmament, tranquille et pure, d'une sérénité magnifique.

   Le psaume final, au début si douloureux, déchirant, alterne désespoir et espoir, se redresse après les phases de lamentation, reflet d'une condition humaine tourmentée.

   Un disque admirable, tout en respirations, floraisons et modulations colorées, délicates, en dérapages minuscules et contrôlés au bord de ce que certaines oreilles appelleraient des fausses notes. Les cinq orgues - et les quatre organistes : Tineke Steenbrink, Francesca Ajossa, Jan Hage, Lise Morrison, sonnent merveilleusement les approches d'un monde ineffable au fil de ces compositions désarmantes par leur apparente simplicité et leur véritable richesse intérieure, foisonnante.

De gauche à drioite et de haut en bas : Tinieke Steenbrink, Francesca Ajossa, Jan Hage et Lise MorrisonDe gauche à drioite et de haut en bas : Tinieke Steenbrink, Francesca Ajossa, Jan Hage et Lise Morrison
De gauche à drioite et de haut en bas : Tinieke Steenbrink, Francesca Ajossa, Jan Hage et Lise MorrisonDe gauche à drioite et de haut en bas : Tinieke Steenbrink, Francesca Ajossa, Jan Hage et Lise Morrison

De gauche à drioite et de haut en bas : Tinieke Steenbrink, Francesca Ajossa, Jan Hage et Lise Morrison

Paru en septembre 2023 chez elsewhere music (Jersey City, États-Unis) / 8 plages / 45 minutes environ

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Publié le 16 Octobre 2023

Jürg Frey - Les Signes Passagers

   Sur la couverture, quelques barres obliques de couleur, à peine appuyées, à peine visibles sur le fond blanc-crème. Il aura fallu que votre rétine fasse un effort pour que ces signes passagers vous apparaissent, que vous discerniez enfin quelque chose. Toute la musique de Jürg Frey, dont j'avais déjà célébré le triple cd Lieues d'ombres (je renvoie les lecteurs à cet article pour des précisions biographiques), est dans ce tremblement d'apparition, dans cette discrétion pudique, en complète opposition avec un certain monde moderne et les musiques qui vous prennent d'assaut, au risque de vous assourdir, voire de réellement vous rendre sourd. Ici, il faut tendre l'oreille, les attendrir pour qu'elles captent le chant secret de l'ineffable. Ces sept pièces pour piano-forte, plutôt que de vouloir s'imposer à nous, sont des propositions de transport pour les auditeurs qui sauront les accueillir. Je comprends le choix du piano-forte de cette manière : non pas une volonté puriste de revenir aux origines, mais le désir de profiter des « imperfections » de l'instrument pour nous entraîner par-delà l'uniformité sonore des pianos modernes. Par « imperfections », il faut entendre des différences dans les sonorités selon les registres, des couleurs inattendues et, en somme, une fragilité émouvante. Curieusement, alors même que je n'avais pas prêté une attention particulière au nom de la pianiste, laquelle m'était inconnue, j'avais l'impression à certains moments qu'elle jouait du koto, tant ce piano-forte est dépaysant dans les compositions de Jürg Frey, tant on croirait alors entendre des cordes pincées ! Cela m'a fait sourire, car j'ai regardé attentivement le livret pour voir si les pièces n'étaient pas pour piano et/ou koto selon les passages...

   Ne te laisse saisir qu'à portée de silence...

   Les titres en français ressemblent à des indications de tempo ou de nuance, sans coïncider avec la liste des termes italiens consacrés par l'usage. Si on trouve "Avec sonorité, mais très calme" (titre 2) ou "Lumineux et calme" (titre 4), d'autres renvoient plutôt à une atmosphère, comme "Léger et silencieux" (titre 1), "Tendre et monotone" (titre 6), ou indiquent une distance : "Au lointain" (titre 5) et "Discrète et loin" (titre 7).

   "Léger et silencieux" commence par un couple répété de notes, comme l'esquisse d'un léger balancement, des notes qui s'espacent, s'éloignent, reviennent pour nous entraîner sur un chemin de résonances. Chaque note est reine, rayonne dans un halo clair ou plus opalescent : plus rien ne compte que la note suivante sur les rives du silence, ce fleuve méconnu. Si vous passez le cap de ces cinq premières minutes merveilleuses, la musique de Jürg Frey vous attend..."Avec sonorité, mais très doux" redouble en plus grave la pièce initiale. Ses boucles lentes dérapent vers un ailleurs pour revenir à une espèce d'incantation hypnotique. Après ce diptyque, la musique s'échappe, minimale et répétitive si l'on veut, mais surtout à la recherche d'une mélodie, patiemment cernée, suggérée, ce en quoi la musique de Jürg Frey est parfois verlainienne, ce qui n'exclue pas, dans "Lumineux et calme" (titre 3), une fermeté, un tranchant qui, par contraste, souligne l'aspect processionnel du battement de cloche du piano. Superbe pièce ! J'aime beaucoup aussi le très répétitif "Très calme" (titre 4), véritable ascèse sonore, dramatique affirmation ou fragile suspension face au mystère dans lequel la composition revient toujours s'enfoncer. La répétition, chez Jürg Frey, est toujours une manière de frapper à la porte, de percer obstinément pour mettre à jour l'autre côté, le lointain, qui attend tout près derrière la cloison. La plus longue composition, "Tendre et monotone", de près de dix-huit minutes, ne signifie rien d'autre que ceci : la tendresse tord le cou à la monotonie, apparente, parce qu'elle en révèle la diversité réelle. La même note ne sonne jamais exactement pareille, différente en hauteur, intensité, couleur, différente aussi par son contexte. L'enregistrement, qui capte le bruit des marteaux, des frôlements, entoure les notes d'un voile fantastique, comme si celles-ci venaient caresser des esprits dormants pour les réveiller, oh, à peine, et ces remuements infimes donnent une vie émouvante à la tendresse précautionneuse des touches. De pièce en pièce revient le motif de deux notes en balancier, motif proprement sublime à partir duquel les variations tournent, tâtonnent, cherchent les Signes Passagers d'une Unité perdue, d'une Vie fragile qu'il ne faut pas effaroucher, "Discrète et loin", nous dit le dernier titre aux notes raréfiées, de plus en plus espacées.

    Un chef d'œuvre de musique transcendante à la sensibilité contenue, frémissante, interprété magnifiquement par la pianiste Keiko Shichijo, au toucher tranquille et lumineux.

Parution prévue le 1er novembre chez elsewhere music / 7 plages / 49 minutes environ

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© Photographie personnelle : Signes Passagers dans le ciel

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Publié le 26 Septembre 2023

Eve Egoyan + Mauricio Pauly - Hopeful Monster

  Je connais la pianiste canadienne Eve Egoyan depuis ses interprétations du cycle Inner Cities d'Alvin Curran et de la musique de sa compatriote Ann Southam. Je sais qu'elle n'a peur d'aucune audace, d'aucune aventure. Et en voici une belle, risquée, avec Mauricio Pauly, compositeur et musicien anglais, né au Costa Rica, désormais installé à Vancouver. La simple revue des instruments utilisés par le duo donnera déjà la mesure du dépaysement probable. La pianiste joue certes d'un simple piano acoustique, mais augmenté par la manipulation d'un piano modélisé et par des échantillons acoustiques ; elle utilise aussi sa voix, pas seulement pour chanter ! Mauricio Pauly manipule des échantillons et des traitements électroniques en direct, joue de la chromaharpe (une sorte de cithare) désaccordée et d'un ensemble de percussions (sous réserve, traduction de "drum bundle").

   Le disque comporte dix pièces, entre deux minutes trente et un peu moins de neuf minutes. Je considérais au début les premières comme des mises en oreille, entre free jazz et musique expérimentale. Très vite cependant, et déjà dans le premier titre "Spore", le disque prend une autre envergure, devient l'exploration de continents sonores d'une fascinante étrangeté. Indéniablement, le disque s'inscrit dans la lignée ouverte par les pièces pour piano préparé de John Cage. Seulement, il ne s'agit pas d'un piano seul. On entend souvent plusieurs instruments en même temps grâce aux traitements, et tous sont plus ou moins affectés d'une augmentation, d'un déréglage  sonore, ils dérapent vers l'inconnu, si bien qu'on est tout surpris, émus même quand le piano redevient le piano qu'on connaît. Sans cesse, la musique s'échappe, s'engage dans des chemins imprévus. Le piano ouvre un labyrinthe, un palais des échos et des distorsions. Des sources surgissent, ruisselantes, ou bien grincements et frottements nous mènent avec le piano martelant, comme dans "Dive", dans une forgerie de cristal. "Braid", orchestral et polyphonique par moments, laisse planer une atmosphère inquiétante, drones à l'arrière-plan et paquets foisonnants de tresses (l'un des sens de "braid") tordues, de glissendos résolument hors des clous de la gamme, comme des loups tournant en guimauve. "Dialing with abandon" poursuit l'amollissement des sonorités, et monte peu à peu la voix d'Eve, démultipliée, dans ce concert purifié par la plus pure fantaisie sonore, loin des règles anciennes : s'élève alors une curieuse ode fragile, soutenue par le piano en apesanteur et des drones légers. Moment d'une grâce indicible !

    Tout est devenu possible, les amarres larguées. "Stilled Shadow", si sobre, si calme, ménage une plage méditative, travaillée par de profonds remous : nous sommes ailleurs. La seconde partie peut commencer ! "Single spore flexing gently" réaffirme la torsion à l'œuvre dans tous les sons : échos courbes, glouglous et bondissements rythmiques, c'est une dévastation tranquille, une table rase. La folie semble s'installer dans "Agree no frown" : percussions déchaînées, voix mêlées, pour une cacophonie euphorique tournant aux hoquets hagards ! Après ces rivages difficiles parfois pour l'auditeur, il faut le dire, nous abordons sur trois terres splendides, trois pièces assez longues entre six minutes trente et presque neuf minutes. On respire, on écoute ces chants extatiques, le grouillement percussif d'un monde lointain, de nouvelles harmonies subtiles. Là tout est miroitements, surgissements translucides, feuilletages en vrilles. Là règnent les illusions, vaporeuses ou puissantes, les cordes qui sonnent comme des instruments asiatiques frémissants d'inflexions désaccordées. Le neuvième titre, "Height", est sans doute le chef d'œuvre de l'album, d'une magnificence somptueuse dans ses dérapages incessants qui donnent l'impression de voix démoniaques surgies des profondeurs. "Effort grind braid", après un début chaotique, inaugure une musique post-industrielle proliférante, répétitive, dans laquelle le piano augmenté monte à une incroyable puissance dans une atmosphère découpée par une rythmique erratique, avant de nous ramener au piano presque "pur" dans des méandres élégiaques assez émouvants.

   Il faut avoir confiance en ce « monstre plein d'espoir », lui passer ses moments les plus "destructifs", car il recèle des beautés inouïes. Eve Egoyan et Mauricio Pauly, plus que des musiciens, interprètes ou compositeurs, sont des créateurs d'univers sonores, à l'arraché de l'aventure.

Paraît le 6 octobre 2023 chez No Hay Discos (Montréal, Canada) / 10 plages / 57 minutes environ

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Pas d'extraits autres à vous présenter, mais il reste...

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Publié le 10 Août 2023

Lawrence Ball - Prayer for the Breath of the World (Piano : Nicolas Horvath)

   Lawrence Ball est un compositeur britannique né en 1951. Diplômé en Science de l'ordinateur et en mathématiques, il a notamment étudié la composition avec Robert Boyle, un proche de Philip Glass, de 1978 à 1979. Intéressé par les sons, la musique et les images produits de manière algorithmique, il travaille dans une branche des mathématiques appelée mathématiques harmoniques. En 1996, il a fondé le Planet Tree Musique Festival, qu'il dirige toujours, présentant la musique d'Alan Hovhaness, Kaikhosru Sorabji, ou encore Jean Catoire, ce compositeur français dont le pianiste Nicolas Horvath (justement lui !) a entrepris une intégrale monumentale. Parmi les influences revendiquées par Lawrence Ball, on notera la présence de Terry Riley et LaMonte Young, minimalistes de la première heure mettant en œuvre boucles et répétitions, mais on trouvera aussi, outre encore Alan Hovhaness, Erik Satie et Arvo Pärt. À ces noms connus, il convient d'ajouter son goût pour les musiques marocaine ou indienne, le jazz, le rock. Il ne lui paraît pas étrange d'associer musique et méditation ou musique générée par ordinateur. Le catalogue de ses œuvres, essentiellement tonales, est immense... Son ami Nicolas Horvath publie sur son label Nicolas Horvath Discoveries deux suites pour piano, la n°9 en cinq parties et la n°8 en trente.

Lawrence Ball - Prayer for the Breath of the World (Piano : Nicolas Horvath)
À la pour(suite(s)) du Mystère...  

La suite n°9 joue surtout sur des boucles à la main droite, soutenues par des notes isolées dans les mediums. C'est un lac paisible sous plusieurs éclairages, avec la lumière qui chante doucement tendue vers le ciel. Déjà le crépuscule s'approche, le promeneur marche à pas lents, attentif à la danse diaphane des gouttelettes frémissantes à la surface du lac...

   L'ample suite n°8 est d'allure plus grave, plus recueillie, trouée de silences. Un peu moins d'aigus, plus de médiums et surtout quelques graves. L'heure est à la méditation, à l'intériorité, au dépouillement. Des thèmes reviennent, enveloppés d'une brume rêveuse, presque disloqués par la lenteur. Avec d'imprévues relances mystérieuses, comme en 8.

   Puis la suite se met à chanter, en 11, un air touchant, souvenir d'Alan Hovhaness ou Georges Ivanovitch Gurdjieff. Un de ces airs qui touchent à l'ineffable en quelques notes. La suite en est transformée, transcendée. Elle nous transporte dans ses volutes résonnantes, énigmatique et belle, vers une grâce d'autre monde. Elle semble parfois revenir en arrière (la 15 sur la 14, par exemple), et c'est pour mieux nous ensorceler dans ses petites mélodies tendues comme des fils fragiles sur le néant de toute chose. Avec son parfum oriental, la 18, solennelle et vaporeuse, incante le soir mystique. La 19, c'est Satie tel qu'en lui-même, son fils des étoiles au regard droit dans une cathédrale ouverte sur le ciel...

   Les cloches sonnent, c'est la 20, aux boucles envoûtantes, un des sommets de cette suite sublime. On gravit un escalier, ou une échelle, comme Jacob, ô l'étonnante 24, porté par les harmoniques de cette économie confondante. Puis  c'est la 25, qui me fait frémir à chaque écoute, aux boucles denses et haletantes, au doux balancement hypnotique. Qu'y a-t-il de plus beau que cette musique ? Il y a en elle une pureté vibrante que Nicolas Horvath donne à entendre note après note grâce à un toucher précis et respectueux de cette approche pudique et sans cesse reprise, une pour(suite) obstinée du Mystère, la respiration du monde pour laquelle le compositeur nous invite à prier.

Paru fin juillet 2023 chez 1001 Notes ACEL - Nicolas Horvath Discoveries / 35 plages / 55 minutes

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Publié le 3 Août 2023

David Shea - Una Nota Solo, et pas seulement...
Protée des musiques contemporaines

David Shea ! Né dans l'Indiana en 1969, ce compositeur américain, installé en Australie depuis 2002, m'accompagne depuis longtemps, depuis au moins la naissance de ce blog en 2007, blog sur lequel j'ai publié notamment :

1)  le 22 juillet 2008, un article titré David Shea : sorcier de la musique électronique, maître de l'échantillonneur

2) le 13 juin 2020, une nouvelle version d'un article de 2007, titrée Hommage à David Shea, qui rend compte notamment du magnifique Book of Scenes, avec le pianiste Jean-Philippe Collard-Neven et l'altiste Vincent Royer

3) le 24 octobre 2014, un article consacré à Rituals, avec Lawrence English et Robin Rimbaud (alias Scanner) à l'électronique, Oren Ambarchi à la guitare, Joe Talia aux percussions et Girish Makwana aux tablas.

4) le 29 août 2017, un article consacré à Piano I, interprété par le compositeur lui-même.

   David Shea a enregistré chez plusieurs maisons de disques, dont les plus marquantes sont : Tzadik, Sub Rosa, Metta Editions (cofondé avec son épouse Kristi Monfries), et de plus en plus, depuis qu'il réside en Australie, sur le label de Lawrence English Room40.

Protée, pourquoi ? David Shea ne cesse de surprendre. Maître des échantillonneurs et de la musique électronique, il écrit aussi pour le piano seul, en joue, écrit pour des formations classiques, invente des hybrides (électronique + bols chantants + incantations + musiciens en direct + sons de terrain..), se lance dans la musique d'inspiration spirituelle (bouddhiste). Un temps DJ dans des clubs de musique électronique, il compose pour l'IRCAM, travaille avec Luc Ferrari ou John Zorn, est fasciné par Giacinto Scelsi, et on le dit élève de Morton Feldman (à vérifier...). Contemporain, électronique, expérimental, du monde et d'ailleurs, David Shea ne cesse de se recréer !

 

Una Nota Solo, réédition d'une musique-monde

   Paru d'abord chez Metta Editions, sa maison, en 2005-2006, Una Nota Solo reparaît chez Room40 fin juillet 2023. C'est un album de transition, proche des albums de la période Sub Rosa (1993 à 2005), comme Satyricon ou Tryptich (paru lui chez Quatermass en 2001), marqué par l'usage des échantillonneurs. La musique synthétique est flamboyante, parfois traversée d'incursions instrumentales de l'Ensemble Ictus ou de l'Ensemble des Musiques Nouvelles (sur "Layer I" par exemple). Tout le début ("Una Nota Sola/Due" et "Layer I) est une vraie splendeur, foisonnante ou suprêmement tranquille. "Layer II" est plus baroque, charriant des couches très diverses, comme s'il s'agissait d'agréger toutes les musiques possibles, du bol chantant à l'échantillonneur. "Layer III" semble un jeu de massacre, jouant de décalages brutaux, bruitistes, avec intrusion de musiques populaires et de sons de terrain imprévisibles, mais fascinant, au moins au début, par ses boucles minimales, quasiment techno. Ce qui pourrait être insupportable, ce déversement d'échantillons, ne laisse pas d'être curieusement émouvant, et sert de prélude à la méditation "Sunset/Sunrise" (titre 5), tout à fait dans l'optique des musiques traditionnelles, avec percussions profondes et graves, bol chantant et voix bourdonnantes, sauf que l'intrusion brève d'échantillons un peu avant deux minutes et plus loin vient perturber la sérénité majestueuse de cette prière au soleil couchant/levant.

   "MG" (titre 6) poursuit dans la veine néo-traditionnelle, sorte de musique de transe avec section de cordes, violon dansant et fin ambiante imprévue. Début magique de "XY Suite" au Glockenspiel, puis thérémine (?) : on est souvent perplexe en écoutant David, ne sachant plus où finissent les échantillonnages. C'est très beau, méditatif, les belles résonances ensuite redoublées par un somptueux passage orchestral synthétique, mystérieux à souhait. David Shea fait du David Shea, mais c'est si réussi ! "XY2" est tout aussi fantasmagorique, tenant un équilibre éblouissant entre musique contemporaine austère et musique cinématographique, onirique. Encore un chef d'œuvre d'intelligence musicale, d'une beauté à couper le souffle.

  Faut-il poursuivre ? "CrossVibrations" est dans la veine de "XY Suite". Je suis (nettement) moins enthousiasmé par "La Spezia"(titre 10) et son déluge de sons de terrain, de bruits de foule, même si je comprends la fascination de David pour la ferveur de masse. Morceau à éviter... Et les "String Rhizomes" qui suivent, s'ils me paraissent poussifs au début,  sont plus réussis ensuite avec un largo mélancolique et une folie orchestrale magistrale, dérivant vers une jungle sonore sidérante et un marais post-techno vraiment réjouissant ! "Time Capsules" reprend le début envoûtant de "Layer III", littéralement explosé par des échantillons, et un autre motif du même titre, allongé... et détruit par un déferlement échantillonnesque (je risque le néologisme) ahurissant, à la limite de l'insupportable, mais David, en véritable sorcier virtuose, nous promène dans une galerie de monstres sonores, dans un immense palais des souvenirs de nos émois. Confondant, et assez séduisant ! "Memory Lane I" semble un clone de passages d'albums plus anciens comme Satyricon ou Tryptich (orthographe de la pochette...). On y retrouve le goût du grandiose, d'un certain carnavalesque, tempéré par un sens très sûr des limites, à savoir une manière d'enrober ce vertige dans un halo élégiaque magnifique. Et je me laisse prendre, porter par cette musique-monde au charme souverain !

Après l'outrance fastueuse, les trois derniers titres nous rappellent que David est un Protée insaisissable. "Vibration" est un miracle de sobriété bourdonnante, comme une épure battante émaillée de crissements et griffures. "Walking by a Mountain" hésite entre gigue et musique chamanique avant de finir en comète ambiante, juste pour nous laisser avec "A Gong Alone" et ses bourdons (drones), ses mystérieux appels, ses frottements métalliques, titre cérémoniel envoûtant.

   Le disque éblouissant et généreux d'un des Maîtres de la musique d'aujourd'hui, contemporain et inactuel.

(Re)Paru le 21 juillet chez Room40 (Australie) / 16 plages / 1h et 19 minutes environ

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The Thousand Buddha Caves, du David Shea illuminé
David Shea - Una Nota Solo, et pas seulement...

   J'avais laissé passer ce disque marqué par le passage au Bouddhisme du compositeur. Un chef d'œuvre de musique fervente, rituelle. Douceur extatique et passages dramatiques (liés à la vie de Bouddha), somptuosité musicale, avec psalmodies, voix de gorge, instruments traditionnels ou non (même du piano). À découvrir absolument, c'est encore du David Shea, du grand David Shea !

Paru en mars 2021 chez Room40 / 10 plages / 1 heure et 3 minutes environ

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Publié le 25 Juillet 2023

Giovanni Di Domenico - Succo di Formiche

   Après l'admirable L'Occhio del Vedere, paru il y a quelques mois à peine, Giovanni di Domenico (je renvoie à l'article précédent pour des éléments biographiques) revient avec un disque pour lequel j'ai eu d'abord un peu peur. Le premier titre, "Non aver alba" me semblait relever, pour aller vite, d'un jazz de chambre certes très bon, mais assez prévisible, quand la musique s'est mise à déraper vers d'autres contrées musicales. Je l'ai bien sûr rapatrié dans ces colonnes. Giovanni est cette fois le seul compositeur, au piano, Fender Rhodes et orgue. Il est accompagné par quatre musiciens : Pak Yan Lau au Hohner Planet (un piano électrique), piano jouet et synthétiseur, Manuel Mota à la guitare électrique, Stan Maris à l'accordéon et Joe Talia à la batterie et à l'électronique.

   Sept morceaux qui forment une suite, un tout. Sept morceaux qui ne s'en tiennent jamais à l'horizon attendu. Une musique vivante, en constante ébullition, entre (free) jazz et musiques expérimentales, plus accessible sans doute que celle du disque précédent. Avec Yves Klein en couverture, de sa série des fourmis, Anthropométrie sans titre (Ant 84), 1960, au MAMAC de Nice, Giovanni Di Domenico extrait donc du Jus de fourmi / Succo di Formiche. De l'acide formique, dont on dit que c'est un désherbant naturel puissant. Cela laisse songeur. Je comprends le titre ainsi : désherber la musique, lui ôter ses mauvaises herbes, ses mauvaises habitudes, ses parasites, pour ne laisser croître que la Musique, vivante et saine...

  Très beau début pour "Non aver alba", le morceau qui m'inquiétait, disais-je : orgue, accordéon et électronique pour quelques notes tenues dans une atmosphère solennelle. Puis le piano en grappes glissantes, un peu jazz, sur le même fond répété, et une esquisse de mélodie au bord de la mièvrerie, mon inquiétude au maximum en dépit d'une densité croissante du tissu musical à cause de ce bavardage pianistique qui se poursuit quelques minutes. Giovanni, je commence à m'ennuyer. Heureusement, le titre décolle dans un foisonnement magnifique, grandiose, le piano se met au diapason de ce glissement sublime. Ouf ! Et c'est le deuxième titre, "Un coperta di silenzio", une merveille de délicatesse, cette couverture de silence. Le piano minimaliste pique une broderie électronique diaphane, parcourue de diaprures, de glissendos, de voix mystérieuses, d'un tintinnabulement fantastique et doux. Ne sommes-nous pas dans le fourmillement des fourmis, dans la fourmilière même, au milieu de multiples petits déplacements, bruissements ? C'est un véritable enchantement !

   "Gli altoparlanti dei grilli" (les Haut-parleurs [ou Orateurs ?] des grillons) joue avec une très belle mélodie au piano, répétée dans un esprit minimaliste et dédoublée au Fender Rhodes, batterie discrète, atmosphère recueillie. Du jazz si l'on veut, oui, libre et expérimental, tout en floraison sonore étonnante, comme un bouquet de plus en plus flou, saturé de halos, qui nous conduit à "Minum", de la même veine, chaleureux, fusionnel. Je ne sais pas pourquoi je songe, à cet instant précis, à Soft Machine, ou si je sais, pour l'alchimie sonore psychédélique dégagée par ce titre, le côté rock aussi. "La scatola di grissini perfetta", le titre suivant, est d'ailleurs tout à fait psychédélique, très proche de Gong [fondé par David Aellen, de Soft Machine, justement], très spatial, foisonnant de frémissements, de gargouillis...

 

...débordant sur une  brève reprise incandescente de "Minum". La suite se termine avec "il ritorno e'sempre più corto", boucle échevelée au rythme d'enfer que le piano freine progressivement par une autre boucle sur laquelle se greffe une autre boucle !

   Une très belle folie, ce disque, comme un  hommage vibrant au jazz fusion, à une pop progressive psychédélique qui construisait des albums comme des symphonies d'aujourd'hui !

Paru le 14 juillet 2023 chez Unseen Worlds (Brooklyn, New-York) / 7 plages / 42 minutes environ

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Publié le 12 Juillet 2023

Andrius Arutiunian - Seven Common Ways of Disappearing

   Conçu au départ pour une installation au Pavillon arménien de la Biennale de Venise en 2022, Seven Common Ways of Disappearing est devenu le premier album de l'artiste arméno-lithuanien Andrius Arutiunian. Il s'agit d'une pièce pour piano à queue réaccordé et électronique analogique, pour deux musiciens qui naviguent dans la topographie de la partition, donnant de la composition une des multiples versions possibles Ici le compositeur est l'interprète unique de l'une d'entre elles. La partition prend la forme d'un ennéagramme, en hommage à Georges Ivanovitch Gurdjieff, maître spirituel controversé mais influent, qui a tenté d'introduire en Occident un syncrétisme philosophico-ésotérique marqué par les pensées moyen-orientales, soufies, bouddhistes... C'est lui qui a réintroduit la figure ésotérique de l'ennéagramme, considéré par le compositeur comme un schéma structurant. Ci-dessous une vidéo réalisée lors de l'installation au Pavillon arménien de la 59ème biennale de Venise.

   Deux versions titrées "Forwards" et "Backwards" (En avant et En arrière), chacune d'environ vingt-deux minutes, figurent sur le disque. La première se caractérise par un fond de bourdon. On se croirait dans une composition de Éliane Radigue, sur laquelle vient carillonner le piano réaccordé en grappes lumineuses. L'impression d'un décollage imminent, en même temps d'un sur-place extatique, illuminé par les giclées aléatoires du piano devenu portique de cloches pour un temple inconnu, un piano possédé. Cet immense tintinnabulement produit une musique hypnotique, stupéfiante, propre à dissoudre le Moi, d'où peut-être le titre du disque, qui peut aussi faire indirectement référence aux mystérieuses et longues disparitions de Gurdjieff. Vers quatorze minutes, le bourdon s'intensifie, devient grondement tourbillonnant, menaçant d'engloutir le piano livré à sa transe, avant de s'éloigner et de laisser le piano et le reste de l'électronique dessiner de folles figures de chutes libres. C'est absolument magnifique...

   "Backwards" est une version plus schizophrène, si j'ose dire, le piano et l'électronique comme des éclats de miroir se répondant plus ou moins autour d'une boucle serrée, presque étouffante, de piano. Le tissu musical semble happé par l'obscur, en dépit des miroitements étincelants du piano brisé. Un mur de percussions perforantes vient occuper le premier plan de l'espace sonore, donnant à cette seconde pièce une dimension inquiétante. Des jets de particules créent d'étranges vents, ou des marées dissolvantes, qui ne parviennent pas, toutefois, à faire taire les pianos (celui de la boucle, et celui qui ne cesse d'éclater en éclaboussures). De lourdes ponctuations plombent la fin de cette version moins séduisante, mais impressionnante par son expressionnisme implacable. Il s'agit d'une destruction, farouche, déterminée.

    Une musique fascinante, entre extase lumineuse et puissance magnétique obscure.

Paru début juin 2023 chez Hallow Ground (Lucerne, Suisse) / 2 plages / 44 minutes environ

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