david lang - bang on a can & alentours

Publié le 6 Avril 2023

David Lang - shade
David Lang, en majesté

   Un article pour un disque si court ? C'est vrai, en général, j'élimine...sauf si, voilà, ce n'est pas n'importe quel musicien, c'est David Lang, dont je suis un inconditionnel depuis longtemps. Au point qu'il a dans ce blog, lui et les autres cofondateurs du festival Bang On A Can, une catégorie, "David Lang - Bang On A Can & alentours". Je crois n'avoir négligé que ses opéras (sauf un), et ses musiques de film. Pour le reste, il est bien ici chez lui, je cite dans le désordre :  writing on water (2018), Child (2003), Pierced (2008), Are You experienced ? (2001), this was written by hand (2011), the day (2018), death speaks (2013), mystery sonatas (2018, grande année Lang), The Carbon Copy Building (2006), opéra coécrit avec Michael Gordon et Julia Wolfe, the little match girl passion (2009)...

   La pièce maîtresse, c'est la composition éponyme, "shade", pour trio (le Mammoth TrioElly Toyoda au violon, Ashley Bathgate au violoncelle et Lisa Moore au piano) et orchestre à cordes (le Contemporaneous, direction David Bloom, comprenant 18 violons, 6 altos, 6 violoncelles, 4 contrebasses). David Lang précise : « Tout ce qui se passe dans l'orchestre est un détail projeté sur eux à partir de la musique d'abord jouée par le trio avec piano. Le trio avec piano initie toute la musique, et l'orchestre vit à son ombre. » [ italique ajoutée  par mes soins].

  Le violon dessine dans le ciel des arabesques, un peu comme dans les mystery sonatas, rejoint par le piano, puis le violoncelle, puis l'orchestre des cordes. La musique est montagne, pentes et montées. Tout danse et s'élance, un frisson sublime passe dans ces assauts, cette géologie tumultueuse. Que du nerf, une netteté extraordinaire dans cette mélodie démultipliée. Un bref arrêt annonce un deuxième temps, le violon et le piano déchiquetant une esquisse mélodique, dans les fragments de laquelle l'orchestre, et notamment les contrebasses, pose des fondations sombres. Le violon continue ses mouvements vifs, les cordes dans les creux, le piano réduit à une ligne discontinue de notes presque confondues avec les pizzicati du violoncelle ou d'autres cordes, puis commence un troisième temps, très rock d'inspiration, d'attaques abruptes, le violoncelle répondant au violon. Vers huit minutes, c'est un mouvement lent, d'une infinie suavité, à pleurer de beauté, déchirant, par le trio seul, avant que l'orchestre réponde pudiquement, puis emporte la mélodie vers des hauteurs mystérieuses, au rythme d'un bercement tapissé par le piano si calme. Le temps s'est volatilisé dans l'ineffable. Vers douze minutes, nouvelle phase plus dynamique initiée par le violoncelle, c'est une nouvelle escalade, un gonflement puissant, un tournoiement. David Lang nous tient, et voici la dernière phase, grandiose, menée par le piano, comme une fanfare, une explosion de triomphe, avec de belles suspensions. Tout cela est magnifiquement scandé, découpé, chaque élan s'arrêtant à chaque fois net devant le vertige, puis tout s'éloigne pour laisser le violon exhaler une traînée d'une indicible douceur dans l'au revoir des cordes respectueuses.

   Un absolu de la musique orchestrale du XXIè siècle.

   [ La deuxième pièce, "Wed", a déjà été enregistrée, notamment sur Pierced, sous forme d'une version pour piano solo. C'est ici une version pour orchestre à cordes. À l'origine, elle fut écrite pour le Kronos Quartet, en mémoire d'un amie décédée qui s'était mariée dans son lit d'hôpital. Aussi David Lang avait-il voulu tenir un équilibre entre consonance et dissonance, entre tragédie et espoir. Belle pièce pudique, entre renaissance perpétuelle et failles intimes, tout en fins glissements et respiration ralentie. ]

Paru le 24 mars 2023 chez Cantaloupe Music / 2 plages / 23 minutes environ

Pour aller plus loin

- disque en écoute et en vente sur bandcamp :

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Publié le 13 Août 2021

Michael Gordon - 8

Après Timber pour six percussionnistes jouant des simantras amplifiés, sorti en 2011, Rushes pour sept bassons en 2014, voici 8 pour huit violoncelles. Michael Gordon, l'un des trois compositeurs co-fondateurs du Bang On A Can All-Stars et de tout ce qui tourne autour (Festival, le label Cantaloupe...), est fasciné par les multiples. Huit violoncelles dans un cercle, environnés par le public, qui, en théorie, peut s'installer à l'intérieur. L'œuvre s'inscrit dans la fascination du compositeur pour les musiques de transe, les musiques extatiques, ce dont témoigne un des ses plus anciens disques, Trance (Argo, 1996). Citons-le : « Ces œuvres [ écrites pour des séries d'instruments identiques ] sont censées produire un état quasiment méditatif, presque extatique, chez l'auditeur comme chez l'interprète. »

8 devrait être écouté en entier, d'affilée, et non en tranche comme le permet le découpage souvent proposé par commodité (ici même, c'est un comble !!), mais en contradiction avec sa finalité. Comme d'autres compostions de Michael Gordon, elle frappera les amateurs de Steve Reich par un vocabulaire familier, peut-être d'abord par ce frémissement de la pulsation, ces saccades serrées, ce battement qui s'enfle et qui décroît. De plus, on peut voir ces 53 minutes comme un vaste canon perpétuel, qui nous enserre peu à peu dans ses harmoniques ondoyantes au point d'abolir tout repère temporel : tout se met à flotter, et l'on peut essayer d'imaginer ce que ressentent les interprètes, et le public, encerclés, traversés par une trame changeante, tantôt légère, tantôt puissante. Avec de bonnes enceintes dans une grande salle, à défaut avec un excellent casque pour retrouver ce sentiment d'immersion, ce tournoiement des entrées et des arrêts, on perçoit la parenté de cette musique avec celle des derviches tourneurs, par exemple. Parenté seulement, car la dimension méditative est associée à la visée extatique. Ce grand calme qui parcourt toute l'œuvre : aucune hâte, aucune frénésie, c'est aussi la différence majeure d'avec le disque Trance ou les derviches tourneurs.

   La sérénité de la pièce tient aussi à l'intrication de la mélodie et des notes basses, une sorte de bourdon percussif qui parfois monte au premier plan lorsqu'elle s'efface en une belle alternance, à une ample respiration tranquille, sûre d'elle.Vers la fin de la pièce, les glissendis ajoutent du liant, épaississent la toile qui se met à scintiller de lents vacillements dans un mouvement de renverse d'une immense douceur. Les violoncelles sont devenus quasiment des harmoniums !

  Une des grandes réussites de Michael Gordon !

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Paru en avril 2021 chez Cantaloupe Music / 1 plage  / 53 minutes environ. [ il existe un autre découpage, peu satisfaisant à mon sens...]

Pour aller plus loin :

- album en écoute et en vente sur bandcamp :

En bonus, très logiquement, un extrait de l'excellent Trance, paru sur le magnifique label Argo en 1996.

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Publié le 29 Août 2018

David Lang - writing on water

   DAVID LANG : quand ce nom sera-t-il enfin aussi connu que ceux de Steve Reich ou Philip Glass ? J'adore Steve depuis longtemps, tandis que Philip Glass tantôt m'envoûte, tantôt m'agace. Je crois que la célébrité, actuellement, pour ce qui concerne les compositeurs vivants, est proportionnelle à la dose de facilité de la musique, je dis cela sans mépris aucun notez-le bien. Quelques notes suffisent à faire reconnaître du Glass ; une certaine pulsation renvoie irrésistiblement à Steve. Il n'en est peut-être pas de même avec la musique de David Lang, pour laquelle il faut être un bon grimpeur. Oui, chaque composition se présente comme une falaise à pic, qu'il convient d'escalader avant d'atteindre le plateau austère, traversé de courants intenses. La musique de David ne fait pas dans l'arrondi, ne cherche pas à séduire par des procédés reconnaissables. Elle est sculpturale, abrupte, elle avance sous les vents violents, elle griffe jusqu'à arracher de la beauté, vous propulse vers des acmés sublimes et totalement inattendus.

   Les quatre compositions de l'album en sont la parfaite illustration, en même temps qu'elles témoignent de la diversité de l'univers musical de David Lang, dont le magnifique disque avec Maya Beiser, the day, est également un exemple. Le titre éponyme est une commande à l'occasion du deux centième anniversaire de la mort de l'amiral Lord Nelson à la bataille de Trafalgar (1805). Le livret de Peter Greenaway (qui en a fait aussi un film) s'inspire de textes de Shakespeare, Coleridge et Melville, est interprété par l'ensemble Synergy Vocals (interprète régulier de l'œuvre de Steve Reich) et le London Sinfonietta. Forced march (2008) a été commandé par le Crash Ensemble dirigé par Alan Pierson - faut-il rappeler que l'ensemble a été créé en 2007 par le compositeur Donnacha Dennehy, qui produit, édite et prépare cette composition ? Increase (2002) est joué par Alarm Will Sound, autre ensemnle réputé de la musique d'aujourd'hui, tandis que pierced  (2007) réunit le trio violoncelle-piano-percussion  real quiet et le Flux Quartet. Autrement dit, David Lang mobilise sur sa musique quelques-uns des meilleurs ensembles de musique contemporaine, ce qui devrait nous (vous) mettre la puce à l'oreille !

     writing on water, au si beau titre, est une œuvre immersive de presque trente minutes. La falaise est là, d'emblée, bloc de chanteurs à l'unisson dans une une intensité maximale, texte porté haut, soutenu par la musique martelante. On est à la limite du soutenable, puis la guitare électrique décroche du mur sonore dans un solo très rock : cors, trompettes et trombones enrobent le tout d'une épaisse gaine cuivrée, on remonte vers les hauteurs dans une atmosphère de transe lourde zébrée de trajectoires instrumentales, et soudain c'est la grâce, un chanteur au timbre chaud s'envole, rejoint par les deux autres dans un dialogue extatique. Admirable contrepoint, on est en apesanteur, suspendus à la musique extraordinaire de David, d'une sérénité sublime au-dessus de l'abîme. Les instruments répondent par une pulsation un rien reichienne, qui se met à exploser très lentement. La basse chante le naufrage, juste soulignée par une ligne de violoncelle et des notes répétées de piano. Mine de rien, writing on water est un oratorio, dramatique à souhait, avec des passages lyriques qui ne dépareraient pas dans une composition religieuse. Ici enchâssés dans les masses orchestrales tumultueuses, ces passages prennent un relief stupéfiant par leur hauteur poétique, la beauté de l'articulation, des inflexions. Et lorsque les voix replongent dans le flot instrumental, elles se lancent vers le ciel si vibrantes, fortes, que l'auditeur est galvanisé. Vers vingt-trois minutes, la musique de Lang prend les allures de celle d'Arvo Pärt, d'une indicible douceur, les voix sur un tapis de clochettes, sur un tintinnabulement d'une infinie suavité. Prodigieuse et bouleversante évocation de la noyade :

My body lay afloat.
Upon the whirl, where sank the ship,
The boat spun round and round.
The sledge-hammering seas
bale out the pouring water as mountain torrents

down a flue.
The approaching tide will shortly fill the reasonable

shore
that now lies foul and muddy.
This soul hath been alone on a wide wide sea,
and the great shroud of the sea rolled on as it rolled

five thousand years ago.
And I only am escaped to tell thee, A sadder and a wiser man.

   Forced march annonce l'allure, martiale, de ces presque quinze minutes instrumentales. Rien à voir cependant avec une éventuelle musique militaire ! C'est une force qui va, dirait le père Hugo. Concentrée, grondante, toujours au bord de l'explosion, elles nous mène vers une clairière mystérieuse, un moment magique dans la forêt épaisse, effrayante si bien rendue par le Crash Ensemble. Avec une coda tendue, ralentie, qui se décante vers le silence...

    Increase est comme son titre l'indique en augmentation perpétuelle, iceberg colossal, paroi vertigineuse à escalader. Un grondement périodique rythme cette montée vers le haut Thibet musical. L'ivresse instrumentale est constante, folle et puissamment scandée par les percussions. Quelles textures, quels timbres ! Un hymne aux forces vitales, une polyphonie absolument ahurissante !

   pierced avait été enregistré en 2008 chez Naxos, interprété par une formation plus importante, celle du Boston Modern Orchestra Project avec déjà le trio Real quiet. Ici, la formation de chambre est remplacée par le Flux Quartet. C'est donc une version resserrée, mais tout aussi magistrale. Je renvoie à mon article enthousiaste d'alors. C'est un bloc de quartzite sous l'orage noir, de lave vitrifiée zébrée de morsures électriques, une cathédrale fulgurante...

   Évidemment un chef d'œuvre, un sommet, un absolu. « Une musique à trembler, qui soulève et qui fend...». David Lang est le plus grand compositeur vivant, comment en démordre après un tel disque ?

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Paru en avril 2018 chez Cantaloupe Music / 4 plages / 65 minutes environ.

Pour aller plus loin :

- chez la maison de disque de David Lang, Michael Gordon et Julia Wolfe, Cantaloupe Music.

- le disque est en écoute et en vente sur bandcamp :

 

 

(Liens mis à jour + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 29 septembre 2021)

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Publié le 2 Juin 2018

David Lang  / Maya Beiser - the day

   Une rencontre au sommet ! D'un côté la violoncelliste Maya Beiser, à laquelle j'ai consacré un article synthétique d'hommage au tout début de l'existence de ce blog, en 2007, "Maya Beiser, le violoncelle sans frontière" (article mis à jour et "sonorisé" !). De l'autre David Lang, pour moi le plus grand compositeur vivant. Tous les deux se connaissent depuis longtemps, au moins depuis le disque World to come, publié en 2003 sous le seul nom de Maya, unique instrumentiste de l'album. La composition de David Lang lui donnait son titre. On y trouve aussi une version pour quatre violoncelles de "Fratres" d'Arvo Pärt, le très élégiaque et foisonnant "Mariel" d'Osvaldo Golijov et le "Lament for Phaedra" de John Tavener.

David Lang  / Maya Beiser - the day

  Il se trouve que le nouveau disque de David Lang nous propose à nouveau la composition "World to come", pour violoncelle et violoncelles préenregistrés. Seule différence insignifiante : en 2003, elle était en quatre parties, alors que maintenant elle est donnée d'un seul tenant. C'est curieux d'ailleurs comme la mémoire travaille : je ne me souvenais plus qu'elle accompagnait de la voix son violoncelle. Sur le site du label Cantaloupe, David Lang revient sur ce dédoublement instrument / voix, avec une séparation plus sensible à mesure que le morceau progresse : celle-ci serait une métaphore de la séparation de l'âme d'avec le corps au moment de la mort. La musique raconterait leur combat pour se réunifier dans un monde post-apocalyptique paisible. Au début le violoncelle, en courtes phrases percussives, avec de brusques syncopes, doublé par la voix qui semble en surgir, en être l'émanation. Puis le violoncelle se dédouble, d'un côté le phrasé grave qui ne cesse de retomber, de l'autre une esquisse de mélodie dans les médiums, la voix se faufilant entre les deux avant de s'envoler quand un troisième violoncelle s'est ajouté. L'image d'une fleur qui s'épanouit, ouvre ses pétales. L'âme chante dans la lumière, son chant ondule doucement, elle monte pour disparaître. Le violoncelle gémit langoureusement. La mélodie surgit, sublime élégie auréolée par les autres violoncelles qui lui font une couronne frémissante. C'est un élan très doux, d'une inoubliable tendresse, toujours renaissant. Il n'y a plus rien que cette beauté exhalée. Un cœur de violoncelle prend le relais pour soutenir la même mélodie, un peu plus grave. Atmosphère d'ivresse légère, édénique, exultation marquée par le retour des ponctuations marquées. Nous sommes dans le monde à venir, infiniment suave, détaché des choses terrestres, qui se déploie et se replie avec des mouvements d'une grâce inexprimable, dans l'attente des retrouvailles se fait attentif. Les violoncelles accueillent le retour de la voix, se taisent pour qu'elle vibre pure dans le silence, se démultiplie elle-même jusqu'à ce qu'un seul violoncelle vienne l'enlacer, puis un deuxième ponctue la marche nuptiale, la lente montée : le violoncelle a absorbé la (les) voix.

   Ne reprochons donc pas à David Lang de recycler une vieille composition : quelle joie de retrouver un joyau intemporel et de l'offrir à un public nouveau, renouvelé. D'autant que le disque nous donne à entendre une œuvre de 2016, "the day"... Mais auparavant...

   "the day" : non seulement la musique de David Lang, mais ses mots, dits par Kate Valk, accompagnés par le violoncelle de Maya Beiser. Le texte se présente comme une très longue énumération de phrases à la première personne, déclinées alphabétiquement à partir du deuxième terme (verbe ou adverbe) suivant le pronom de la première personne. David Lang a construit son texte à partir d'une recherche par internet des phrases commençant par " I remember the day that I..." Extrait, le début :

the day

words by david lang

I remember the day
the day I ‘got’ it
I achieved the perfect engineering drawing
I actually was able to laugh with delight
I approached one the students
I arrived
I arrived and the fear of being alone
I arrived at the prison
I attended her wedding
I baited my hook
I became a true collector
I became colored
I became one of those things to be cast aside
I began a habit based on such commercials
I believe he parked his car in a driveway between a brick fence

and the building
I bought 6 yards of a cream colored fabric
I bought it
I bought my first issue
I brought five items into the dressing room and they all fit
I brought him a pumpkin pie
I bumped you
I came across it in a local yarn shop
I came home from school, the day that darn boy punched me I came home knowing that I wouldn’t go back
I came with him
I carried him, sleeping
I caught the bug

I chose the name
I could finally speak
I could no longer get out of bed
I cried my soul out
I decided
I decided I wanted my own studio
I decided I would switch
I decided it was my favorite number
I decided that the pain I was causing myself was truly optional I decided to be less busy in my life
I decided to become a composer
I decided to end it, it was like a light came on in my head
I decided to learn how to make my own
I decided to make a significant change in my lifestyle
I decided to move there for good
I decided to quit
I decided to run 18 miles
I decided to start

I did it
I did my first pull ups
I discovered that I would be independent
I discovered that site
I discovered the lights
I discovered the obscure figure
I disrespected my mom
I drove there
I earned my first pay
I emailed her to ask if I could be involved
I emailed him
I entered high school
I fell in love (...)

   La voix énonce les propositions, le violoncelle l'accompagne sobrement de phrases ponctuées de silences. À partir de "I fell in love", interviennent des violoncelles préenregistrés, la composition devient chorale. Le lyrisme s'épanouit merveilleusement, les violoncelles langoureux en notes tenues, comme des corolles successives autour de la voix. Tout prend une dimension mystérieuse, on avance dans la merveille de la vie. Ce que dessine cette longue litanie, c'est en effet une vie, des vies multiples, la succession des choix à chaque moment du jour qui devient l'image globale de la destinée humaine, tissée de petits riens. Il est évidemment judicieux de placer ce titre avant "World to come", tourné vers l'après-mort. L'émotion grandit au fil du morceau, soulignée par les phrasés diaphanes des violoncelles, leur pureté démultipliée. On est encerclé par les développements enveloppants, comme si la vie prenait les allures d'un rêve. C'est l'envoûtement, une envolée sublime qui ne finit plus, la voix enchâssée dans les volutes baroques, avant la retombée dans les moments difficiles :

I went to my therapist and I told her that my hips and knees were hurting
I went to the army
I went to the doctor I actually felt sick
I went to the hospital to see you
I went with some friends to get away for the weekend

I wrote my letter of resignation

  Deux chefs d'œuvre qui se répondent, se complètent. Un des grands disques de ce début de siècle !

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Paru en janvier 2018 chez Cantaloupe Music / 2 plages / 54 minutes environ.

Pour aller plus loin :

- l'album en écoute et plus :

 

(Liens mis à jour + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 28 septembre 2021)

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Publié le 27 Janvier 2018

David Lang - thorn

   Une surface aride hérissée d'épines acérées : la redondance de la couverture par rapport au titre thorn (« épine ») a quelque chose de rude, de sauvage. Les auditeurs sont prévenus : ce nouvel album de David Lang, l'un des trois compositeurs fondateurs du collectif musical Bang On A can , n'est pas là pour flatter vos oreilles ou pour les tapisser de miel. Le disque regroupe des petites pièces écrites pour la flûtiste Molly Barth, membre fondatrice de l'Ensemble Eighth Blackbird. Elle est accompagnée par un ensemble pouvant aller jusqu'à sept instrumentistes (piccolo, trompette, hautbois, violon, violoncelle, piano et percussions).

  David Lang a donné des notes d'intention pour chaque pièce. Je les ai lues...pour mieux les oublier ? Ce qui compte dans la perspective de cet article, c'est la réception.

   Le titre éponyme est en effet hérissé d'épines, tout en aigus, en souffles courts, acérés. Impressionnant solo de Molly qui nous tient en haleine, sans relâche aucune. Nous entrons dans l'univers dense de David Lang. "lend/lease" fait dialoguer la flûte et la percussion sèche des blocs de bois : comme de la musique japonaise décantée jusqu'à l'os. Piccolo, piano, violon et violoncelle sont requis pour "short fall", danse haletante, serrée, sur un lit de notes de piano en boucles. Le désert a fleuri de tous ses cactus, ses agaves. Les bouquets explosent en gerbes serrées, tranchantes, en quasi apesanteur. David est en pleine forme ! "Involontary" serait une musique de fanfare pour deux piccolos, deux trompettes, un batteur à la caisse claire : enjouée, claironnante (si j'ose dire !), sans rien de pesant, irrésistiblement entraînante. Pour flûte et piano, "vent" nous entraîne au cœur de l'univers langien, dans une course vertigineuse, âpre, ponctuée d'arrêts brutaux. Crêtes de montagnes, à-pics, escalades implacables. Les deux instruments se mêlent, s'enlacent avec furie, se fracassent ensemble pour repartir avec des accents suaves, des virgules farouches. À lui seul, le morceau justifie l'acquisition de l'album, chef d'œuvre qui laisse pantelant, étourdi. Et ce n'est pas fini. L'étourdissant "burn notice" est un carrousel effréné des différents instruments, comme une spirale infinie s'élargissant, se reconstituant sans cesse autour de la flûte moqueuse, hoquetante, spirale de plus en plus irréelle affectée de ralentis et d'accélérations prodigieuses. Magistral, là encore ! Le disque se termine avec "frag", abréviation pour "fragmentation bomb". Flûte, hautbois et violoncelle pizzicato découpent impitoyablement l'espace sonore dans un rituel hallucinant, l'unisson se fragmentant en courts segments abrupts dont finissent par surgir, autour de la flûte aux abois, des à-plats mélodieux, tenus.

    Un très grand disque de musique contemporaine par l'un des tout premiers compositeurs d'aujourd'hui, que je défends depuis des années.

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Paru en 2017 chez Cantaloupe Records / 7 plages / 37 minutes environ.

Pour aller plus loin :

- l'album en écoute et plus :

 

Différentes compositions (pas seulement de l'album "thorn") de David Lang en concert :

(Liens mis à jour + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 28 septembre 2021)

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Publié le 14 Mars 2017

Michael Gordon - Timber remixed

   J'avais salué avec enthousiasme la sortie de Timber en 2011 (ici). Ce double album ne mérite pas moins le détour. Outre une excellente version en public de l'œuvre originale par Mantra Percussion sur le cd2, le cd1 nous offre douze remixes inédits, douze relectures, certaines vraiment magnifiques. C'est le cas de la première, par l'islandais Johánn Jóhannsson. Le tapis percussif laisse passer des nappes fluctuantes d'orgue qui semblent l'envelopper, qui le font voyager comme le ferait un tapis volant. Une magistrale envolée ! Le new-yorkais Sam Pluta croise percussion et électronique dans une trame serrée parcourue d'harmoniques, créant une respiration vibratoire hypnotique par ses longues ondulations qui vivent de plus en plus intensément. Deuxième indéniable réussite ! Le canadien Tim Hecker disloque la nappe percussive, agitée de battements puissants, démultipliée dans une véritable galerie des glaces sonore, mais la pièce est trop courte, je trouve, comme souvent chez lui, si bien que l'on se sent un peu frustré, on attend des développements qui ne viennent pas (c'est la raison principale pour laquelle je n'avais pas rendu compte de son dernier opus, Love Streams). Après lui, l'autrichien Fennesz transfigure vraiment la pièce, ça décolle vite et fort, du superbe travail. La réappropriation est brillante, très inattendue, à la fois puissante et rêveuse !! Le musicien expérimental Oneohtrix Point Never cerne les percussions de voix synthétiques, de perturbations sonores, dans un collage comme il les affectionne, un peu foutraques, mais sacrément efficaces, avec un long crescendo final de toute beauté. Le batteur de Deerhoof, Greg Saunier, sature la composition avec ses propres percussions, d'où une courte pièce étrange et folle...non dénuée d'une pointe d'humour, ce qui ne fait pas de mal dans ce parcours ! Avec le titre suivant, je découvre HPRIZM / High Priest of APC, membre fondateur du Antipop Consortium, qui propose une version tribale avec des déhanchements rythmiques, des invasions de claviers. Là aussi une très convaincante relecture, une recomposition passionnante, qui condense au mieux la dimension de transe. Le guitariste de rock Ian Williams joue sur les échos rapprochés, accélérés, ce qui donne un titre presque abstrait dans sa ligne pure. Quant au britannique Tom Jenkinson, alias Squarepusher, il recrée le morceau avec sa guitare et diverses clochettes. On pense à Pantha du Prince et ses très beaux Elements of Light (2013) ou encore Black Noise (2010). Il réussit un moment bucolique très inspiré, traversé de zébrures de synthétiseurs, de sourdes attaques vibratoires. Un des sommets de ce disque ! Installée à New-York depuis 1977, la japonaise Ikue Mori, comme à son habitude, transforme ce qu'elle visite en OVNI sonore : chambre hantée dans laquelle surgissent girations sonores, crépitements, grondements, métallophones peut-être, toute une vie qui fait penser à une toile de Tanguy ou de Miro. Venue de Warp Records, la britannique Mira Calix crée une pièce résonnante, grouillante de facettes translucides, véritable kaléidoscope pour un voyage au pays des merveilles : c'est fragile et cristallin, lumineux, mystérieux ! Superbe ! Ce premier cd se clôt avec le remix de Hauschka, qui noue si l'on peut dire son piano préparé aux percussions initiales pour une sorte de danse qui s'embrase, radieuse, chargée de sons électroniques orchestraux. Magistral ! 

   Un album remarquable, foisonnant !

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Paru en 2016 sur le label Cantaloupe Music / 2cds / 12 remixes + la version en public de Timber / 69' + 51'

Pour aller plus loin :

- la page consacrée à l'album sur le site de la maison de disque.

- l'album en écoute sur bandcamp :

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Publié le 1 Novembre 2016

Florent Ghys - Bonjour

   Contrebassiste et compositeur, le bordelais Florent Ghys a choisi de s'expatrier pour trouver enfin une maison de disque et un milieu musical réceptif à ses créations. C'est très logiquement qu'il a trouvé sa place chez Cantaloupe Music, le label de David Lang, Michael Gordon et Julia Wolfe, les fondateurs du Bang On A Can All-Stars. En effet, sa musique réfère autant au post-mimalisme qu'à un rock indépendant voire au jazz. Comme les trois américains, il crée une musique intense où la part acoustique reste forte, ancrée dans une instrumentation à base de cordes, mais avec percussion ou encore guitare électrique. Il est temps qu'il rejoigne bien d'autres musiciens que je défends, l'ayant repéré (grâce à Timewind) avant son départ pour les États-Unis pour des compositions magistrales dont je n'ai jamais rendu compte dans ces colonnes, allez savoir pourquoi.

   Avec Bonjour, il signe son quatrième disque sur Cantaloupe. Deux contrebassistes (dont lui, bien sûr), une violoncelliste, un guitariste et un percussionniste forment un orchestre de chambre restreint, chaque instrumentiste donnant aussi de la voix. Le disque a été enregistré en direct.

La guitare électrique ouvre" Friday 3PM", le premier titre, avec quelques notes piquées en boucle, vite rejointe par le chœur puis les autres instruments dans une sorte de canon brouillé. La parenté avec l'univers de David Lang me semble toujours aussi patente : même patient constructivisme, même élaboration d'une pâte sonore de plus en plus dense passant comme par-dessus de menus déraillements, se tissant de réitérations en réitérations toujours plus lancinante, envoûtante. Avec des sonorités presque crues, à vif, nous entraînant jusqu'au bout du souffle des voix. "Wednesday" couple violoncelle et voix en courtes virgules répétées, sur lesquelles les autres instruments tissent un contrepoint capricieux et savant. On est proche du halètement, dans quelque chose de très sensuel, que la guitare suspend avant que la(les) contrebasse(s) ne s'en mêlent. Tout repart avec une rythmique brute, et chaque fois c'est la guitare qui casse la dynamique et la relance pour revenir au motif initial, avec une belle montée en puissance pour transcender la petite sauvagerie de chambre !

  On s'accorde, on souffle à peine, c'est "Thursday afternoon", très rock au début dans son déhanchement, puis ça s'épaissit, on est dans un mouvement langien, la musique lève, se fait majestueuse dans ses glissandis. C'est parti, du grand Florent Ghys, le magnifique "Sunday", un abandon langoureux, beaux sons, une sérénité, une chaleur. La pièce procède par petites unités retouchées, fondues, prolongées, qui donnent naissance à des climats heureux. On entend des touches cristallines qui ponctuent l'avancée vers les hauteurs diaphanes. Froissement rapide des cordes sourdes, c'est "Monday Morning", puis silence, le violoncelle dialogue avec la guitare, l'atmosphère est ouatée, mystérieuse. On s'étire dans le murmure de voix multipliées, le mélodica pianote entre les cordes qui recommencent à frémir tandis qu'un battement grave de contrebasse s'amplifie, efface tout, puis le chant des instruments reprend, facétieux et animé,  pour se terminer dans une micro tempête échevelée, grinçante. "Thursday morning" semble plus élégiaque, mais tout autant fantasque en fait, il bavarde familièrement, c'est sans doute la pièce la plus proche du jazz, avec son allure improvisée. Sauf que les voix de retour brouillent les pistes, nous ramènent à vendredi, au premier titre. On s'aperçoit ainsi de l'aspect cyclique de l'album, plus concerté qu'il n'y paraît, capable en quelques mesures de passer certaines frontières musicales, la fin de ce "Thursday morning" fleurant bon une musique de chambre de bon aloi. Avec le dernier titre, "Tuesday noon around 12:21", il serait aussi bien minuit dans cette fantasmagorie tournoyante des cordes alanguies picorées de pizzicati. Le temps s'est arrêté, tourne en rond...

   Un album à déguster avant de vous perdre avec délices dans les méandres de compositions antérieures de Florent Ghys comme son Hommage à Benoît Mandelbrot (2011) ou GPS40 de 2010, dont vous trouverez la présentation sur son site (voir ci-dessous).

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Paru en 2016 sur le label Cantaloupe Music / 7 titres / 50 minutes environ

Pour aller plus loin :

- le site de Florent Ghys

- l'album en écoute (et à acheter) sur la page bandcamp :

- "Sunday" en direct :

(Liens mis à jour + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 12 août 2021)

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Publié le 11 Février 2015

David Lang - mountain

    C'est le Cincinnati symphony Orchestra sous la direction de Louis Langrée qui interprète une des dernières œuvres enregistrées de David Lang. Mais comme Hallowed Ground rassemble deux autres pièces, Lincoln Portrait  de Aaron Copland et Pleasure Ground de Nico Muhly, David Lang n'est pas crédité sur la couverture du disque, ce que je trouve assez regrettable. Passons, comme je passerai exceptionnellement sur les deux autres compositions : j'espère que vous ne m'en tiendrai pas rigueur, mais vous commencez à me connaître. Disons que je ne suis pas assez emballé par celles-ci, qui ne sont pas sans qualité, je le reconnais volontiers : l'émotion n'y est pas, pour aller vite.

   Par contre, mountain est un de ces morceaux à trembler comme nous en offre régulièrement David Lang. Le compositeur précise dans le livret que l'orchestre lui a commandé une pièce qui aurait à voir avec l'héritage d'un grand Américain. Il a pensé à Aaron Copland, compositeur présent avec le premier titre dont l'œuvre est devenue associée à la manière dont les Américains voient la relation entre leur pays et eux-mêmes. Seulement il ajoute que, s'il apprécie l'ironie qu'un pauvre juif homosexuel de gauche représente la musique classique américaine de notre temps, il y a une autre manière de regarder le paysage. Même s'il précise que ce regard différent est en hommage à Copland, je me demande s'il ne se dissocie pas ainsi - sans pouvoir l'écrire, cela ne se fait pas - du style volontiers emphatique de l'auteur de l'emblématique Fanfare for the Common Man. Ce à quoi David nous convie, c'est à une contemplation de la montagne telle que celle à laquelle il s'est livrée, lui qui n'est pas spécialement un amoureux de la nature, depuis sa chambre dans un cottage loué avec son épouse dans le Vermont. Du balcon, sans voir les détails, sans se salir les pieds, juste la vue de la montagne en face, pendant des heures : rude, imposante, belle, intemporelle. C'est cela le sujet de ces douze minutes, de ce bloc, sculpté à l'aide de quatre flutes, trois clarinettes, une clarinette basse, trois bassons, quatre trombones, tuba, timpani, xylophone, vibraphone, percussion basse, harpe et cordes. 

   Flancs abrupts, contre lesquels se heurte la vue

   Flancs lancés vers le ciel, lancés à nouveau

   Farouches escalades rudement ponctuées

   Élans secs et puisants à l'assaut

  

    Silence du silence en retour

 

   Reprises inlassables doublées d'échos

   Épanchements plaies sublimes

   Pourtant

   La montagne ne cesse de s'exhausser

   Tandis que sourdent de ces masses

   Les sons très longs si doux si doux

   Cela ne cessera pas fanfare tonitruante

   Coupée d'abrupts vertigineux qui ne

   Parviennent plus à recouvrir la suavité

   Des hautbois des clarinettes et des cors

   Hautes syncopes faillées unissons fragiles

   Courtes explosions violentes contre

   La persistance de la permanence

   Tournoiements des bassons et des cors

   De la montagne surgit l'or sonore

   Toujours plus haut plus fort

   La montagne est en éruption vive

   Sous les yeux fascinés la calcination

   L'incandescence éternelle jette au ciel

   Des bouquets d'exultante beauté

   Immobile la montagne fracasse

   Le regard ouvre l'ouïe à

   La majesté terrible de la matière

 

Écrit au fil de l'écoute, en réponse à cette musique prodigieuse de l'un des plus grands compositeurs de ce temps, pour moi sans doute le plus grand.

Paru en 2014 chez Fanfare Cincinatti / 5 titres / 48 minutes  

Pour aller plus loin :

   Pas moyen de vous faire écouter mountain pour le moment : je respecte la discrétion de David Lang, même si la tentation est forte de vous le proposer via une plateforme de stockage comme je le fais parfois, aussi je vous renvoie à mes autres articles consarés à David, regroupés dans la catégorie "David Lang - Bang On A Can & Alentours", le dernier consacré à death speak ayant été republié volontairement voici quelques jours.

   Par contre, voici des extraits d'une répétition de "man made", une pièce à ma connaisance pas encore enregistrée et qui s'annonce aussi forte que les précédentes. Interprétée par l'Ensemble So Percussion, l'un des meilleurs ensembles de percussion actuels, et le Los Angeles Philharmonic :

     montagne.............................© Photographie personnelle (cliquez sur la photo pour agrandir)

montagne.............................© Photographie personnelle (cliquez sur la photo pour agrandir)

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Rédigé par Dionys

Publié dans #David Lang - Bang On a Can & alentours