Publié le 22 Octobre 2009

Andrew Byrne : "White bone country", "desert music" pour piano et percussions.
   Australien installé à New-York, Andrew Byrne balise de nouveaux territoires entre post minimalisme et expérimentations autour des polyrythmies, des musiques  extra-européennes. White bone country, le second cd à lui être exclusivement consacré, est un disque qui peut paraître froid, désincarné à première écoute, ce qui ne serait pas en contradiction avec la signification du titre : pays de l'os blanc, blanchi, pays désossé de sable et de sel...Le disque est en somme à l'image du désert. D'abord on ne voit que du dénuement, de la matière pure, de l'horizon. Puis l'œil s'habitue, toute une vie minuscule surgit, tout se met à vibrer d'une lumière étrange et belle. Ainsi en est-il de cette musique qui se révèle après quelques écoutes fascinante.
   Le programme propose deux cycles séparés par un morceau de piano, "Tracks", presque le seul moment où l'on entend l'instrument sonner normalement : composition au dynamisme vigoureux, jouant sur des  polyrythmies complexes, des glissements comme dans une dune de sable qu'on escaladerait en accéléré pour se retrouver à intervalles irréguliers plus bas et recommencer la montée sans se lasser...Les neuf premières pistes présentent le cycle éponyme, pour piano et percussions, subdivisé en "Desert Terrain", "Desert Life" et "Desert Weather". Cela commence comme du Steve Reich, avec un vrai pulse percussif. (premier mouvement à écouter ici)

   Mais Andrew Byrne joue sur la quasi fusion des sonorités traitées du piano et des percussions : nous voilà plongés dans l'univers trompeur du désert qui abolit les différences, nivelle. Monde de micro-différences, d'unités rythmiques fragmentées à l'extrême, réitérées et redistribuées jusqu'à ce que surgissent de nouveaux motifs, que de la sécheresse nerveuse des aigus frappés naissent des sonorités cristallines, rayonnantes. Magnifique ouverture, sur laquelle s'élève le strumming à la Charlemagne Palestine de la pièce suivante, comme l'aura majestueuse du désert, gorgée d'harmoniques. Du vide naît la plénitude. L'auditeur est maintenant prêt à entendre le chant du désert. Crotales, cristaux en suspension dans la lumière radieuse.

   Piano massif et rocailleux accompagné de gongs  incantatoires dans le lointain trouble. Piano et cloches, courte pluie diaphane, miraculeuse. Piano déguisé en cloche, coups frappés à l'intérieur, terre de fantômes. Piano seul, condamné au martèlement, ivre d'échos. Invasion des graves, le côté tellurique, chaos de roches, approche de tempête, et le neuvième mouvement revient sur les 2 et 5, une danse de particules du piano-jouet, des crotales et du glockenspiel.
   Le second cycle, "Fata Morgana : Mirages on the horizon", comprend quatre mouvements composés d'assemblages des sons du piano préparé. La référence à John Cage est explicite, assumée. Quatre paysages d'une étrangeté troublante, avec des échos aux pièces du premier cycle. Le piano se fait orchestre de gamelan à lui tout seul, obstiné, métallique, sautillant.
Paru en août 2009 chez New World Records / 14 pistes, 55 minutes.
Pour aller plus loin
- le site d'Andrew Byrne.

(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 22 janvier  2021)

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Rédigé par Dionys

Publié dans #Musiques Contemporaines - Expérimentales

Publié le 15 Octobre 2009

Selon David Lang : "the little match girl passion"
   Chaque nouvel enregistrement d'œuvres de David Lang confirme l'importance de ce musicien américain, cofondateur avec Michael Gordon et Julia Wolfe de Bang On A Can, nom qui désigne à la fois cet énorme festival new-yorkais consacré aux musiques contemporaines les moins sectaires et l'ensemble instrumental qui les porte.
   "the little match girl passion" est à ma connaissance la seconde incursion d'envergure de David dans le domaine de la musique vocale. La première remonte à cet étonnant "comic strip opera", The Carbon Copy Building, cosigné avec Michael et Julia, aux confluences du rock expérimental et de la musique contemporaine. Cette fois, la musique, interprétée magnifiquement par le Theater of Voices de Paul Hillier, et peut-être sous son influence, semble une étonnante rencontre entre l'univers dépouillé, mystique, de l'estonien Arvo Pärt - que les chanteurs de Paul Hillier connaissent si intimement, et celui... de David lui-même, marqué par un constructivisme d'une absolue rigueur, une densité extraordinaire.
  La Passion de la petite fille aux allumettes, inspirée du conte d'Andersen, le conte préféré de sa femme Suzanne Bocanegra à qui est dédiée l'œuvre, suit le modèle de la Passion selon saint Matthieu de Bach en alternant fragments du conte et extraits qui sont l'équivalent  des réponses de la foule et des personnages ajoutés par Bach au texte évangélique. " Mais il n'y a ni Bach, ni Jésus dans mon œuvre - disons plutôt que la souffrance de la Petite fille aux allumettes se substitue à celle de Jésus, et (du moins je l'espère) place sa douleur sur un plan transcendant", précise le compositeur sur le très éclairant livret trilingue. [Lutter contre le déclin du disque passe par la réalisation de tels livrets, indispensables !! Combien de livrets d'accompagnement sont désespérément vides, parfois beaux certes, souvent illisibles, indigents...]

   "Come, daughter", la pièce d'ouverture, donne le ton de cet opus admirable : à peine ponctuée par une percussion étouffée, elle se développe comme un lamento lancinant, une convergence bouleversante de voix qui mêle appels déchirants et hoquets en bourdon tremblé ou tremolos discordants, presque caricaturaux. D'une beauté stupéfiante. Les fragments narratifs sont autant de récitatifs intenses segmentés, éclairés par la  vibration parcimonieuse de percussions cristallines. Comme toujours chez Lang, aucun bavardage, aucune emphase, une tenue qui creuse dans le tuf d'un absolu étincelant avec une obstination implacable, si bien que tout bref envol de voix lâchées prend des allures sublimes. Une cloche suffit pour que le rapprochement avec Arvo frappe encore, comme dans le morceau 9, "Have mercy, my God". Cloches diverses et crotales rappellent que David Lang est aussi le compositeur de pièces percussives, parmi les plus belles de ce début de siècle. Le morceau conclusif de cette passion, "we sit and cry", en témoigne à nouveau, balbutiement répété qui bute sur la lumière, intérieure, de l'ultime repos.
  

   Le disque propose quatre autres œuvres vocales. La première, inspirée du Cantique des Cantiques, "for love is strong",  est la déclinaison litanique des comparaisons qui illustrent la puissance de l'amour. "i lie", d'après une chanson yiddish, illustre une situation d'attente, d'espoir : chant baigné d'une douce lumière, modeste et fragile."evening morning day" célèbre la création du monde à partir du chapitre 1 de la Genèse à la manière d'un chant grégorien déconstruit. "again" dit l'éternel retour du même selon L'Écclésiaste avec des voix angéliques chargées d'accablantes chimères...
Paru en  2009 chez Harmonia Mundi usa / 19 plages / 65 minutes

Illustration de Yann d'Argent (1824 - 1899)

Illustration de Yann d'Argent (1824 - 1899)

Voici le conte (Noël n'est pas si loin...). Traduction de MM. Ernest Grégoire et Louis Moland.  

Il faisait effroyablement froid; il neigeait depuis le matin; il faisait déjà sombre; le soir approchait, le soir du dernier jour de l'année. Au milieu des rafales, par ce froid glacial, une pauvre petite fille marchait dans la rue: elle n'avait rien sur la tête, elle était pieds nus. Lorsqu'elle était sortie de chez elle le matin, elle avait eu de vieilles pantoufles beaucoup trop grandes pour elle. Aussi les perdit-elle lorsqu'elle eut à se sauver devant une file de voitures; les voitures passées, elle chercha après ses chaussures; un méchant gamin s'enfuyait emportant en riant l'une des pantoufles; l'autre avait été entièrement écrasée.
Voilà la malheureuse enfant n'ayant plus rien pour abriter ses pauvres petits petons. Dans son vieux tablier, elle portait des allumettes: elle en tenait à la main un paquet. Mais, ce jour, la veille du nouvel an, tout le monde était affairé; par cet affreux temps, personne ne s'arrêtait pour considérer l'air suppliant de la petite qui faisait pitié. La journée finissait, et elle n'avait pas encore vendu un seul paquet d'allumettes. Tremblante de froid et de faim, elle se traînait de rue en rue.
   Des flocons de neige couvraient sa longue chevelure blonde. De toutes les fenêtres brillaient des lumières: de presque toutes les maisons sortait une délicieuse odeur, celle de l'oie, qu'on rôtissait pour le festin du soir: c'était la Saint-Sylvestre. Cela, oui, cela lui faisait arrêter ses pas errants.
   Enfin, après avoir une dernière fois offert en vain son paquet d'allumettes, l'enfant aperçoit une encoignure entre deux maisons, dont l'une dépassait un peu l'autre. Harassée, elle s'y assied et s'y blottit, tirant à elle ses petits pieds: mais elle grelotte et frissonne encore plus qu'avant et cependant elle n'ose rentrer chez elle. Elle n'y rapporterait pas la plus petite monnaie, et son père la battrait.
   L'enfant avait ses petites menottes toutes transies. «Si je prenais une allumette, se dit-elle, une seule pour réchauffer mes doigts? » C'est ce qu'elle fit. Quelle flamme merveilleuse c'était! Il sembla tout à coup à la petite fille qu'elle se trouvait devant un grand poêle en fonte, décoré d'ornements en cuivre. La petite allait étendre ses pieds pour les réchauffer, lorsque la petite flamme s'éteignit brusquement: le poêle disparut, et l'enfant restait là, tenant en main un petit morceau de bois à moitié brûlé.
Elle frotta une seconde allumette: la lueur se projetait sur la muraille qui devint transparente. Derrière, la table était mise: elle était couverte d'une belle nappe blanche, sur laquelle brillait une superbe vaisselle de porcelaine. Au milieu, s'étalait une magnifique oie rôtie, entourée de compote de pommes: et voilà que la bête se met en mouvement et, avec un couteau et une fourchette fixés dans sa poitrine, vient se présenter devant la pauvre petite. Et puis plus rien: la flamme s'éteint.
   L'enfant prend une troisième allumette, et elle se voit transportée près d'un arbre de Noël, splendide. Sur ses branches vertes, brillaient mille bougies de couleurs: de tous côtés, pendait une foule de merveilles. La petite étendit la main pour saisir la moins belle: l'allumette s'éteint. L'arbre semble monter vers le ciel et ses bougies deviennent des étoiles: il y en a une qui se détache et qui redescend vers la terre, laissant une traînée de feu.
   «Voilà quelqu'un qui va mourir » se dit la petite. Sa vieille grand-mère, le seul être qui l'avait aimée et chérie, et qui était morte il n'y avait pas longtemps, lui avait dit que lorsqu'on voit une étoile qui file, d'un autre côté une âme monte vers le paradis. Elle frotta encore une allumette: une grande clarté se répandit et, devant l'enfant, se tenait la vieille grand-mère.
- Grand-mère, s'écria la petite, grand-mère, emmène-moi. Oh! tu vas me quitter quand l'allumette sera éteinte: tu t'évanouiras comme le poêle si chaud, le superbe rôti d'oie, le splendide arbre de Noël. Reste, je te prie, ou emporte-moi.
   Et l'enfant alluma une nouvelle allumette, et puis une autre, et enfin tout le paquet, pour voir la bonne grand-mère le plus longtemps possible. La grand-mère prit la petite dans ses bras et elle la porta bien haut, en un lieu où il n'y avait plus ni de froid, ni de faim, ni de chagrin: c'était devant le trône de Dieu.
   Le lendemain matin, cependant, les passants trouvèrent dans l'encoignure le corps de la petite ; ses joues étaient rouges, elle semblait sourire ; elle était morte de froid, pendant la nuit qui avait apporté à tant d'autres des joies et des plaisirs. Elle tenait dans sa petite main, toute raidie, les restes brûlés d'un paquet d'allumettes.
- Quelle sottise ! dit un sans-cœur. Comment a-t-elle pu croire que cela la réchaufferait ? D'autres versèrent des larmes sur l'enfant; c'est qu'ils ne savaient pas toutes les belles choses qu'elle avait vues pendant la nuit du nouvel an, c'est qu'ils ignoraient que, si elle avait bien souffert, elle goûtait maintenant dans les bras de sa grand-mère la plus douce félicité. 

Illustration de Bertall (1820 - 1882)

Illustration de Bertall (1820 - 1882)

(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 22 janvier  2021)

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Publié le 8 Octobre 2009

del cielo : "sous les cendres", un orage de douceur au bord du vide.
   del cielo, duo rennais formé par Cécile Bellat, alias Liz Bastard, textes et voix, et Gaël Desbois, musiques et instruments divers, après un premier EP début 2008,sort un premier cd insolite à plus d'un titre.
   D'abord la voix de Liz Bastard, petite voix acide entre murmures et confidences minaudées ; agaçante de prime abord, tellement inattendue, très vite attachante, délicate et délicieuse, pleine d'énergie aussi, toujours juste.
  Puis les textes, un bonheur permanent : pas de rabâchage pour cacher l'indigence, de vrais textes qui interrogent le quotidien minuscule de l'intime, qui jettent un éclairage décapant sur l'aujourd'hui " et les choses perdues d'avance / au bout du bord du vide / vas-y c'est par là / vas-y c'est tout droit/ (...) avec un goût permanent / pour les failles et les fissures / et les entailles et les blessures/" ["Vers le vide", titre 5]. Atmosphères orageuses, pluvieuses, l'amour, le travail, les images publicitaires, la folie du monde,  questions lancinantes : "tu fais comment quand le temps nous glisse entre les doigts / et quand je tremble de silence et d'ennui / on se resserre / " ["L'Etau", titre 7]. Cet univers menacé, fragile, on le sent proche de celui de Psykick Lyrikah, aussi n'est-on pas étonné d'entendre Arm en fond sur deux titres (sans oublier le renfort de Robert le Magnifique à la basse ou aux machines sur plusieurs titres). Le titre éponyme prend des allures apocalyptiques, comme dans les visions hallucinées d'Arm : "Regarde pas sous les cendres / Il y a  des corps encore brûlants/ Regarde pas sous les cendres/ Il y a des promesses mal tenues / Des horizons calcinés/ Il y a Rome il y a Babylone / Il y a ton code barre qui se consume doucement". L'horizon est sombre " Derrière les vitres glacées / On hurle pas on crie pas / Les ailes collées à la vitre glacée/ ["Les vitres glacées", titre 11], évocation du monde déshumanisé des formulaires administratifs indifférents au "désespoir solidement collé à la vitre embrumée". Reste la révolte "Vas-y crache / Vas-y mords", salutaire...et l'amour sans lequel les plus belles villes sont vides, réactualisation vigoureuse d'un vieux topos romantique ["Des Visages et des Murs", titre 12, le dernier]. Rien ne laisse indifférent dans ces textes sensibles et intelligents, dits-chantés pour nous enchanter...
  [[Coup de gueule au passage. On est d'autant plus enchanté que tant de chanteurs français croient bon d'emprunter la langue de Shakespeare pour nous servir un brouet insipide, une langue mal prononcée. Croient-ils donc élargir leur public ? Comme si Anglais et Américains allaient les écouter ! Et ces pochettes entièrement en anglais... triste anticipation des diktats qui installent déjà l'anglais obligatoire au niveau des cadres des grandes entreprises ? Pitoyable, lamentable, d'avoir peur ou honte de sa langue, à moins que ce ne soit un pudique cache-misère. Et n'oubliez pas que c'est un anglophile qui écrit ceci, avec de surcroît plus de cinquante pour cent de musique américaine -étatsunienne devrais-je préciser, dans ma programmation...]]
  Enfin, les textes sont servis par un accompagnement musical impeccable : beaux sons de guitare électrique, percussions ciselées, discrètes envolées de claviers, scratchs incisifs. Gaël Desbois, qui a travaillé avec Mobiil, Miossec, Laetitia Sheriff, Emma, installe des climats rock/ post-rock/rap aux mélodies efficaces. Ces magnifiques balbutiements de guitare électrique déchiquetée sur "La Plateforme arrière du train", ces claviers implacables puis tournoyants pour l'atmosphère étouffante de "Les Vitres glacées"...Là aussi, quel métier, quelle maîtrise pour un premier disque !
 Paru en 2009 chez Idwet / 12 titres / 37 minutes environ.

(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 19 janvier  2021)

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Rédigé par Dionys

Publié dans #Pop-rock - dub et chansons alentours

Publié le 1 Octobre 2009

Aufgang, un trio exaltant !

Dio. - Quelle claque ! Ô la joie !! Dès le premier titre, "Channel 7", après une brève intro à l'orgue, les deux pianos nous enlèvent, ça piaffe et ça  caracole à un rythme endiablé...
Meph.- Je me sens revigoré ! Aufgang, beau nom allemand pour un sabbat pianistique jubilatoire. On assiste au lever d'un trio étourdissant.
Dio.- Oui, Aymeric Westrich à l'électronique et aux percussions, Francesco Tristano et Rami Khalifé aux pianos.
Meph.- Ce que j'apprécie, c'est la symbiose entre les trois musiciens, Aymerich enveloppant, accompagant avec finesse les envolées pianistiques de ces deux grands instrumentistes. L'électronique n'étouffe pas, elle met en valeur.
Dio.- Tu sais à qui j'ai pensé ?
Meph.- Aucune âme n'a de secret pour moi. À Wim Mertens...
Dio.- Natürlich. Mais ils sont aussi dans un post-minimalisme étonnant, croisé avec des influences jazzy...
Meph.- Ne t'épuise pas. Leurs compositions se laissent difficilement réduire à un quelconque courant. Ce sont des improvisateurs, ils se lancent, nous embarquent avec une prodigieuse aisance. "Barok" commence presque comme du Bach effréné, bondit comme du Mertens en effet, se transforme à vue pour s'intérioriser dans des boucles lancinantes.
Dio.- Et la coda fragile de "Channel 7", après une véritable pyrotechnie pianistique, incroyable. Le début très dancefloor de "Sonar", relayé par des déhanchements répétitifs sur un beat efficace, ne laisse guère prévoir le duo pianistique martelé qui suit, lequel se résout en arpèges très école de Vienne.
Meph.- "Prélude du passé" me réjouit, tellement en rupture par rapport à ce qui précède, pianos évanescents, la délicatesse même...
Dio.- Qu'est-ce qui t'arrive, Meph ? Tu deviens sensible, méfie-toi !
Meph.- C'est dur de porter la lumière, je suis méconnu. Pour en revenir à "Prélude du passé", après ce début hors du temps, intervient la batterie, on se croit dans un excellent trio de jazz, mais alors quelle tenue, pas d'esbroufe, une avancée vers la lumière, là tu comprends ce qui me touche au cœur, cette sereine splendeur.
Dio.- Cinq premiers titres vraiment superbes, on est d'accord, plus de trente minutes impeccables.
Meph.- Le titre 6, "Good generation", est en effet plus bavard, plus mode, l'électro est plus envahissante, peu convaincante.
Dio.- Un faux pas, c'est indéniable. Prolongé par un "3 vitesses" un peu meilleur certes, mais, parasité par une virtuosité encombrante.
Meph.- Le titre éponyme représente sans doute la tentative la plus audacieuse, la plus risquée du disque, piano très contemporain et trame techno. Réjouissant, ce mélange contre nature (diront certains) !! Un hybride, un monstre lâché contre les sectaires de tous bords. Puissant, fort, inventif...
Dio.- Et ce disque généreux se termine sur le superbe "Soumission", presque onze minutes, le piano frappé comme une percussion, joué à l'intérieur comme à l'extérieur, qui sonne parfois comme du piano préparé...
Meph.- Mon morceau préféré, d'un lenteur parfois extatique, au risque d'en agacer les agités, les impatients, tant mieux. Ils sont au meilleur, au plus personnel, pas besoin de démonstration, quelle récompense ce crescendo final, puis cet apaisement tout en éclaboussures suspendues...
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Paru en 2009 chez InFiné / 9 plages / presque 60 minutes
Rami Khalifé, né à Beyrouth, a étudié notamment à la Julliard School de New-York sous la direction d'élèves de Bartok. Francesco Tristano, qui a joué comme soliste avec de nombreux orchestres, a fondé les New Bach players en 2001, avec lesquels il a notamment enregistré l'intégrale des concertos pour clavier de Bach !
Pour aller plus loin
- "Channel 7" et "Soumisson" en écoute

(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 18 janvier  2021)

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Rédigé par Dionys

Publié dans #Musiques Contemporaines - Électroniques