philip glass

Publié le 31 Mai 2022

Philip Glass - Études pour piano (François Mardirossian)

   « dans des landes adoucies par l'attention »

   Oser les études pour piano de Philip Glass, c'est un peu comme tenter de gravir le K2 plutôt que l'Éverest, devenu un quasi boulevard. On marche sur les traces du maître, on l'a entendu jouer, en personne, et l'on ose quand même. Le pianiste François Mardirossian  a entendu Philip Glass interpréter son cycle récemment terminé lors des Nuits de Fourvière en juillet 2007 : un moment inoubliable, pour lui. Qu'il tente de partager avec nous qui n'y étions pas par ce double album. D'autres ont tenté ce parcours, notamment Nicolas Horvath pour son Glassworld 2, deuxième temps d'une intégrale ambitieuse. Disons tout de suite que je ne pourrai éviter une comparaison... difficile et délicate, voire discutable, mais en me limitant à ces deux versions, pour une raison très simple : je ne connais pas les autres. J'écoute tellement de musiques que vous me pardonnerez de ne pas pouvoir être exhaustif. Mon but ne sera pas d'élire une bonne et une mauvaise version, seulement de tenter de cerner les caractéristiques de la nouvelle version de François Mardirossian en m'appuyant sur mon écoute - et l'article déjà ancien consacré à Glassworlds 2. J'ai eu par ailleurs la chance d'écouter Philip Glass lui-même lors d'un autre concert sur le sol français, concert qui m'a durablement marqué. Seulement, écrit-on avec des souvenirs, même vivaces ?

   Ce qui m'intéresse, c'est la cohérence du projet, le respect d'une atmosphère. Il me semble que François Mardirossian a compris l'univers de Philip Glass. Je sais que le compositeur a écrit ne vouloir imposer à personne la façon de les jouer. Une heure vingt-quatre minutes chez Horvath, deux heures quinze chez Mardirossian. Qui a raison ? Les études sous les doigts de François sont sensibles, rêveuses, comme la magnifique étude 5, qui prend le temps de nous charmer. Au fond, ce pianiste américain formé notamment par la grande Nadia Boulanger est un romantique qui plie le minimalisme aux bouillonnements d'une émotion candide. Écoutons l'étude 6, cette fougue jaillissante, l'écume splendide d'une fontaine cascadante digne des cent fontaines de la Villa d'Este. L'interprétation de François Mardirossian restitue cette grandeur, cette fraîcheur merveilleuse : on est emporté, séduit, projeté dans le ciel de l'immortelle beauté. Puis l'on repose sur les rives de l'étude 7, détente aux ombres frangées d'une mélancolie bouleversante. Le piano court, étincelle, pour nous laisser sur une prairie aux fleurs profondes comme nos souvenirs les plus chers. L'étude 8, si elle ressemble tant à du Glass, s'enveloppe d'une étoffe de langueur, d'arpèges fous qui la rendent attachante. Il y a là une pudeur que je reconnais avoir parfois méconnue et tourné en ridicule. François Mardirossian la traite avec une délicatesse touchante.

   Ah ! la courte étude 9, un Glass inconnu - je me souviens l'avoir déjà écrit ! , l'éblouissement d'une écriture bondissante, d'une quasi pulsation hypnotique, et si l'on retrouve quelques fragments et gestes glassiens, ils sont projetés dans un crescendo extatique. Mais je tombe dans le travers d'un compte-rendu des études elles-mêmes, et je m'arrête.

  J'aime la fougue grandiose, l'énergie, les contrastes profonds, la noirceur parfois de Nicolas. J'aime la lumière et le calme de l'interprétation de François, sa pudeur. Si ses études sont plus longues que celles de Nicolas, c'est que son tempo plus lent les nimbe d'une atmosphère de rêve, d'une douceur aussi, sans tomber pour autant dans le piège de la mièvrerie. Peut-être fait-il également davantage ressortir le minimalisme répétitif de Glass, par exemple dans l'étude 12, qui pourrait paraître mécanique si elle ne donnait cette impression de prendre le temps de dilater le temps. Quand Nicolas agglutine, bouscule, nous emporte, François détache les notes, aère la partition, lui donne une grâce, une langueur que j'avais senties sous les doigts de Philip Glass. Je pense à cette magnifique étude 15, d'abord d'une majestueuse lenteur, puis plus virtuose, dont François rend la structure orchestrale d'une grande limpidité, se refusant aux flamboiements sombres de l'interprétation de Nicolas. Et puis le dépouillement fragile de la 16 me touche énormément chez François : une paix surnaturelle baigne l'étude.

  Tandis que Nicolas Horvath choisit une lecture synthétique et transcendante, brillante et très contrastée, François Mardirossian propose une interprétation analytique intériorisée, pleine d'humilité, d'attention, qui sculpte les mélodies de manière telles que, parfois, elles se détachent telles des fleurs frangées de silence sur le ciel spirituel d'un arrière-plan méditatif. Écoutez la fin de l'étude 17, d'une si belle lenteur hors du temps, de toute presse !

   Au fil des études, François Mardirossian trace le portrait sensible d'un homme qui ne cesse d'écouter sourdre sous ses doigts comme une source miraculeuse jaillie dans les landes de l'être et dont il faut détailler les modestes et inépuisables beautés, avec un respect infini.

   Ajoutons que le pianiste est servi par son instrument, l'opus 102 du facteur Stephen Paulello, un piano qui compte 102 notes, de fabrication entièrement française. Sonorités limpides, aérées, idéales pour l'approche de François Mardirossian, soucieux de souligner et magnifier l'architecture élaborée de la musique de Glass.

   Je ne résiste pas au plaisir de constater que voilà enfin un objet disque conçu en France et présenté en français d'abord (secondairement bilingue, et surtout pas unilingue en anglais), ce qui est devenu hélas si rare. La pochette sobre, élégante, signe une production impeccable.

À paraître début juin 2022 chez Ad Vitam / 2 cds / 20 plages / 2 heures et 15 minutes environ

Titre de l'article extrait de L'Homme approximatif, XVIII,  de Tristan Tzara

Pour aller plus loin :

- album en écoute et en vente sur le site de la maison de disque Ad Vitam

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Publié le 27 Septembre 2016

Nicolas Horvath à la Philharmonie de Paris

   Passionnés de piano et admirateurs de Philip Glass, réservez votre Nuit blanche de samedi, car le pianiste Nicolas Horvath, régulièrement présent dans ces colonnes, interprètera dans l'ordre chronologique de composition la totalité de l'œuvre pour piano du compositeur américain. Le concert commencera à 19 heures. Il doit durer douze heures, sans interruption : nouvelle performance et expérience de transe pour ce pianiste habitué aux concerts fleuves.

    Cela vous effraie ? Lui ne bougera pas de son piano, c'est sûr, pas même pour aller aux toilettes comme à l'accoutumée (il s'entraîne spécialement, jeûnant et s'abstenant de boire le temps qu'il faut pour ne pas être dérangé pendant le concert). Vous, vous pourrez aller et venir, discrètement bien sûr, vous assoupir ou dormir à certains moments, c'est à votre guise...

   Voici le programme :

  • Intégrale de l'oeuvre pour piano de Philip Glass
  • 19h00: Sonatina n° 2, 600 Lines, How Now, Two Pages, Music in Fifths
  • 21h00: Music in Contrary Motion, Einstein on the Beach Suite, Improvisation, A Secret Solo, North Star & Victor’s Lament, Modern Love Waltz, Satyagraha :acte III Conclusion, Mad Rush
  • Glassworks: Opening & Closing, The Late Great Johnny Ace: Coda, Koyaanisqatsi: Prophecies, Akhnaten: Dance (acte III sc.3), Mishima: Closing
  • 23h00: The Olympian: Lighting of the Torch, Wichita Vortex Sutra, Powaqqatsi: New Cities & Anthem, The Thin Blue Line, Metamorphosis 1-5, The Screens: Night on the Balcony & More
  • Anima Mundi: Living Waters, A Brief History of Time, Orphée Suite
  • 01h00: Candyman Suite, La Belle et la Bête Suite, Etudes 1, 2, 3, 4, 5, 9 et 10, Jenipapo no 14, Now So Long After That Time (étude 6), Monsters of Grace: Epilogue, Etudes 7, 1, 8
  • The Truman Show: Truman sleeps
  • 03h00: Dracula, Naqoyqatsi: Prologue & Primacy of Number, The Fog of War, The Hours, Dreaming Awake, Metamorphosis 2 newer version
  • 05h00: Piano Concerto no 2, Secret Window end credits, NeverWas Set, Etude 11, A Musical Portrait of Chuck Close (etudes 12 & 13), The Illusionist, Notes on a Scandal
  • No Reservations Combine, Sound of Silence, Etudes 14,15,16,17,18,19,20, Dreaming Awake (version révisée)

Ce programme comprend un certain nombre de premières mondiales, pour lesquelles Nicolas Horvath a réussi à avoir les autorisations. Les voici :

Sonatina n°2 (premiere mondiale)
Improvisation (premiere nationale)
A Secret Solo (premiere mondiale)
North Star (premiere mondiale)
North Star : Victor's lament (premiere mondiale)
Coda from The Late, Great Johnny Ace (premiere mondiale)
Koyaanisqatsi : Prophecies (premiere mondiale)
Powaqqatsi : New Cities (premiere mondiale)
Powaqqatsi : Anthem (premiere mondiale)
Thin Blue Line (premiere nationale)
Anima Mundi (premiere nationale)
Anima Mundi : Living water (premiere nationale)
Candyman – Suite (premiere nationale)
La Belle et la Bete – Suite (premiere mondiale)
Naqoyqatsi : Prologue (premiere mondiale)
Naqoyqatsi : Primacy of Number (premiere mondiale)
Piano Concerto 2 for solo piano. (premiere mondiale, il n’a été donné qu’en mouvements séparés pour le moment)
Secret Window End Credits (premiere mondiale)
Paul's Simon - Sound of Silence (premiere nationale)
Dreaming Awake version revisée (premiere mondiale)

Laissons au pianiste le soin de présenter sa soirée, la vôtre...

 

Quant à moi ? Trop pris par mes obligations professionnelles, il me faudra dormir pour être en forme.

Retrouvez mes articles consacrés aux premières parutions de l'intégrale Philip Glass parues chez Grand Piano / Naxos :

- Glassworlds 1

- Glassworlds 2

- Glassworlds 3

Nicolas, lors d'une autre nuit blanche, le 6 octobre 2012, au Collège des Bernardins, interprète Music in Fifths :

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Rédigé par Dionys

Publié dans #Le piano sans peur, #Philip Glass, #Minimalisme et alentours

Publié le 8 Mars 2016

Nicolas Horvath - Glassworlds 3 Metamorphosis

   Une lecture transcendante de Glass

   Troisième volume de l'intégrale des œuvres de Philip Glass, qu'elles aient été composées pour le piano ou transcrites pour cet instrument, interprétées par le pianiste Nicolas Horvath, Glassworlds 3 Metamorphosis confirme ce qui était déjà audible - et revendiqué nettement - dans les deux précédents disques : le pianiste explore « un univers dense, profond mais sensible et qui ne demande qu'à être découvert ». Sa démarche, c'est une approche en effet sensible, romantique, celle d'un homme libre qui s'aventure dans les partitions pour en extraire les beautés. Pas de respect obligatoire d'une interprétation qui serait intangible. Je rappelle que pour les détails techniques ou les références des pièces, je renvoie à l'excellent livret, aux notes du pianiste. Je me place du côté de l'auditeur amateur, des effets produits.

   Comme le disque s'ouvre sur les fameuses Metamorphosis, tout amateur de la musique de Philip Glass ne manquera pas d'écouter la version que le compositeur en a donné dans le disque Solo piano paru en 1989 chez CBS. Les différences sont importantes. La plus extérieure est dans l'écart de durée pour quatre pièces sur cinq. Trois sont plus longues, comme la I : 5'39 chez Philip, 7'17 chez Nicolas. Une est plus courte, la III : 5'30 chez Philip, 3'29 chez Nicolas. Ce n'est pas une première dans l'histoire de la musique, bien sûr. Nicolas prend son temps, le dilate ou le concentre, selon son humeur. Le résultat, ce sont les différences intérieures : c'est qu'il nous propose une lecture vraiment nouvelle de celles-ci. Philip Glass les joue avec un dynamisme, une clarté, assez similaires, j'ai presque envie d'écrire avec une neutralité brillante, à même de souligner la virtuosité, les variations thématiques d'une écriture combinatoire. Nicolas Horvath plonge dans la forêt des notes, s'abandonne dans les allées du labyrinthe. Tout est plus mystérieux, plus varié, plus imprévu. On se perd dans la forêt au long de la I : tout baigne dans une pénombre reposante, et il faut aller cueillir au détour des sentiers invisibles quelques fulgurances lumineuses éparses. Il y a parfois une incroyable douceur, une indicible langueur, comme s'il hésitait devant un Graal intimidant, qu'il faut apprivoiser par des approches courtoises. À d'autres moments, la fougue s'empare de lui, les notes sortent en torrent pressé ; une énergie indomptable emporte l'auditeur, impressionné par la frappe étincelante, acérée, comme dans la Metamorphosis IV, magnifiquement bousculée, extraordinaire de clarté illuminante. On se souvient que Nicolas joue Liszt, on comprend que Nicolas transcende Glass, pour notre plus grand plaisir. Les contrastes sont puissants sans être jamais brutaux ou vulgaires, car l'interprétation reste constamment délicate, attentive, précise. Après les envolées des pièces III et IV, la Metamorphosis 5 referme le cycle sur des brumes épaissies, peut-être parce qu'on ne sort pas du cycle des métamorphoses, on plonge à nouveau dans les mystères de la vie. Quelle lecture formidable, magistrale !

   Le disque propose aussi la Trilogy sonata, trois pièces transcrites pour le piano par Paul Barnes, extraites de trois opéras « portraits » du compositeur. La danse d'Akhnaten est éblouissante, virevoltante, comme l'épiphanie de la lumière sur les pyramides. La conclusion de Satyagraha bouleverse par le lyrisme de sa mélodie ascendante, grave, irrésistible comme la marche du Sel de Gandhi, inoubliable par sa beauté radieuse. Un antidote contre toutes les morosités ! L'intermède "Knee Play n°4" extrait de Einstein on the beach alterne une mélodie coulante simple et belle avec des moments tumultueux d'arpèges enchevêtrés. Nicolas distingue à merveille les deux strates qu'il entrelace avec une incroyable subtilité, presque un brin de facétie et dans le même temps un immense respect.  

   À ce programme ambitieux le pianiste a joint une de mes pièces préférées de Philip Glass, "Two Pages" (1968), joyau de la musique minimaliste dure. Fondée sur un processus additionnel de groupes de croches, elle crée très vite un effet hypnotique saisissant (ou de décrochement pour l'auditeur qui n'entend que le faussement même...) avec lequel Nicolas Horvath semble très à l'aise. C'est impeccable, "métronomique" et simultanément flamboyant comme un tapis chatoyant de courtes flammes piquées de pointes, véritable tapis volant de la grande maya, cette nature illusoire du monde pour les Hindous, mais également incarnation de la géométrie et de la sagesse éternelle.

   On appréciera la générosité de ce disque, qui nous donne aussi à entendre des pièces rares ou inédites : la petite pièce pour la cérémonie d'ouverture des vingt-troisièmes jeux olympiques, petit format pour une ode vibrante, grandiose, qui ménage pourtant un passage introspectif avant l'ascension finale. "The Late, Great Johhny Ace" appartient à la famille glassienne des ballades élégiaques, presque transparentes de limpidité. "A Secret solo" est au contraire une courte pièce effrénée, délirante, inspirée par les transes des ragas indiens : superbe curiosité ! Enfin, la"Piano Sonatina N°2" de 1959, qui clôt l'album, est un souvenir émouvant de l'itinéraire musical de Philip Glass, alors élève de Darius Milhaud. Il se dégage de cette pièce mise de rien savante un parfum post-debussyste délicieux, à mi-chemin entre fantaisie et rêverie.

   

   À ce programme ambitieux le pianiste a joint une de mes pièces préférées de Philip Glass, "Two Pages" (1968), joyau de la musique minimaliste dure. Fondée sur un processus additionnel de groupes de croches, elle crée très vite un effet hypnotique saisissant (ou de décrochement pour l'auditeur qui n'entend que le faussement même...) avec lequel Nicolas Horvath semble très à l'aise. C'est impeccable, "métronomique" et simultanément flamboyant comme un tapis chatoyant de courtes flammes piquées de pointes, véritable tapis volant de la grande maya, cette nature illusoire du monde pour les Hindous, mais également incarnation de la géométrie et de la sagesse éternelle.

   On appréciera la générosité de ce disque, qui nous donne aussi à entendre des pièces rares ou inédites : la petite pièce pour la cérémonie d'ouverture des vingt-troisièmes jeux olympiques, petit format pour une ode vibrante, grandiose, qui ménage pourtant un passage introspectif avant l'ascension finale. "The Late, Great Johhny Ace" appartient à la famille glassienne des ballades élégiaques, presque transparentes de limpidité. "A Secret solo" est au contraire une courte pièce effrénée, délirante, inspirée par les transes des ragas indiens : superbe curiosité ! Enfin, la"Piano Sonatina N°2" de 1959, qui clôt l'album, est un souvenir émouvant de l'itinéraire musical de Philip Glass, alors élève de Darius Milhaud. Il se dégage de cette pièce mise de rien savante un parfum post-debussyste délicieux, à mi-chemin entre fantaisie et rêverie.

Nicolas Horvath - Glassworlds 3 Metamorphosis

   Inspiré d'un bout à l'autre, Nicolas Horvath nous fait découvrir pour notre plus grand bonheur un autre Philip Glass, plus humain, où la technique n'est plus qu'un chemin vers les grandes sources énigmatiques, mythiques et magiques, de la vie. Que nous réserve Nicolas Horvath pour la suite de ces mondes de Glass ?

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Paru en  2015 chez Grand Piano / Naxos / 13 titres / 77 minutes.

Pour aller plus loin :

- le site de Nicolas Horvath

- mes articles consacrés à "Glassworlds 1", "Glassworlds 2"

(Liens mis à jour + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 10 août 2021)

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Publié le 8 Septembre 2015

Philip Glass - Glassworlds 2 / Nicolas Horvath, piano

Dans le fleuve impétueux des métamorphoses de la Vie

   Pour le deuxième volume de son intégrale des œuvres du compositeur américain Philip Glass, le pianiste Nicolas Horvath a choisi de présenter l'intégralité des vingt études pour piano, composées entre 1991 et 2012, réparties en deux livres de dix études, le second plus long de quelques minutes. C'est l'occasion pour l'amateur de découvrir Philip Glass tel qu'en lui-même, par -delà une certaine image qu'il a lui-même contribué à forger, celle d'une complaisante facilité. Pour avoir moi-même, voici quelques mois à peine,  écouté en concert Philip Glass interpréter en concert quelques-unes d'entre elles, j'étais "préparé" à ce choc qu'est l'écoute de ces vingt pièces, mais je ne m'attendais pas à l'ampleur de la révélation. J'avais constaté déjà l'inventivité du cycle, également goûté l'humour, l'humanité de Glass, sa simplicité lorsqu'il parlait de lui-même, de ses œuvres. Je découvre ici ce qu'il convient d'appeler un poète visionnaire du piano, son instrument de prédilection qu'il approfondit en France avec Nadia Boulanger après avoir étudié aux États-Unis notamment sous la férule de Darius Milhaud. Il faut mentionnner aussi, bien sûr, la rencontre déterminante avec Ravi Shankar, qui donne à sa musique cette dimension de chant lyrique débordant. C'est une musique qui emporte, qui touche, sans se soucier des étiquettes : minimaliste, romantique, classique, elle jaillit avec une naïveté et une force que rend à merveille son interprète. Nicolas Horvath porte cette musique de toute sa fougue, de tout son amour pour le compositeur, et cela s'entend. Il est ce qu'il joue, passionnément, entièrement.

   La première étude sonne comme du pur Glass, à la fois par la mélodie et le flux. On reconnaît sa marque de fabrique, mais on est séduit par la variété mélodique, la complexité du contrepoint. Menée allègrement, c'est une étude virtuose, presque étourdissante, dansante. La deux m'a surpris : les premières mesures m'ont rappelé irrésistiblement l'une des plus belles pièces pour piano du vingtième siècle, "In a landscape" de John Cage. Hasard ? Réminiscence ? Je ne sais. Elle réussit à concilier la veine mélancolique avec la force de sa partie centrale. La trois est travaillée par des répétitions insistantes, des grondements graves. Pièce orageuse, sombre, fracturée, d'un dynamisme quasiment rageur, éclairée d'une envolée dans les médiums. La quatre est plus noire encore au début, mais l'amoncellement de nuages est touché par des éclairs de grâce, des enroulements magiques ébouriffants avant une coda d'une brièveté sévère. La mélancolie revient avec la langoureuse étude cinq, d'une immense douceur pour décliner les accords glassiens les plus reconnaissables. Autoportrait sans fioritures en homme sensible, c'est une pièce bouleversante, une halte dans ce premier cycle souvent agité, tumultueux. La six renoue avec une virtuosité étourdissante, chantante, orchestrale, puissamment découpée par des attaques vigoureuses, tandis que la sept, tout aussi vigoureuse par moments, semble plus inquiète, tirée vers une intériorité qu'elle masque par des fanfaronnades mais qui s'affirme sur la fin de la pièce tout en demi-teintes, prélude à la belle numéro huit, aux mélodies si naïves, que Nicolas Horvath détaille avec une grande sensibilité et dont il souligne les passages les plus complexes d'un phrasé clair, limpide. La fin élégiaque en est superbe.

   Pourquoi changer de paragraphe alors que le livre I n'est pas terminé ? C'est que pour moi, l'autre Philip Glass commence ici. Dès les premières mesures de l'étude neuf, j'ai frémi, soulevé, STUPÉFAIT, par la beauté confondante de cette pièce inattendue, nettement en dehors des mélodies et motifs du compositeur. Philip Glass se laisse aller à une poésie incroyable. C'est étincelant, vigoureux, et en même temps mystérieux, intrigant. La dix, dernière du Livre I, joue des boucles jusqu'à créer des amas sombres traversés de fulgurances. Quelle puissance ! Et dire qu'on trouve parfois la musique de Philip Glass mièvre, douceâtre !! Rien de tout cela : voilà du magma brut, décoré de médiums ou aigus survoltés, ça roule, charrie jusqu'à la dernière seconde. La onze continue dans une veine grandiose, voilà du Beethoven minimaliste, déchaîné, lyrique jusqu'à la transe. Magnifique, je tombe à genoux, j'embrasse compositeur et interprète, terrassé par la beauté terrible, ombrée d'une belle fin sombre, une des plus belles du cycle, annonciatrice d'un troisième Philip Glass, qui sait ?  Si la douze paraît plus glassienne sur le plan mélodique, elle multiplie les variations internes, se gonfle d'une énergie irrésistible, d'une verve opératique indéniable. Le flux des boucles serrées est d'une incroyable densité, laisse éclore des bulles mélodiques magnifiques, se charge aussi d'une émotion intense sur la fin. La treize carillonne, joyeuse, débridée, tel un cheval décidé à sauter tous les obstacles qu'on a l'impression d'entendre hennir de plaisir.

     La quatorze semble un flot soulevé par une houle profonde. La musique de Glass prend une dimension océanique confondante. Certains s'attendaient peut-être aux piécettes d'un vieux monsieur un peu gâteux et on découvre au fil du cycle l'univers d'un créateur en pleine possession de ses moyens, qui creuse magistralement ses sillons et élargit de surcroît nettement son cercle ! La quinze en est l'illustration flamboyante, sorte de marche triomphale à la parure somptueuse, qui se permet des pirouettes narquoises par-dessus le marché. Avec la seize, on revient à la veine élégiaque, ou plutôt contemplative : simplicité du chant, recueillement touchant, mais la musique de Glass ne s'y attarde guère, bouillonne à nouveau, d'une jeunesse pétillante qui secoue le voile mélancolique dans la partie centrale de la pièce. La dix-sept oscille entre atmosphère voilée, retenue, et grandes envolées martelées de fortes frappes. C'est l'une des plus longues du recueil, dépassant les six minutes. L'ampleur des développements est impressionnante, le sens du contraste saisissant. La suivante, qui revient autour de trois minutes, est agitée, crescendo ondulant qui reprend à peine souffle. L'avant-dernière, plus longue, s'abandonne à cette seconde veine, minoritaire dans le recueil, d'une introspection plus sombre, d'une lenteur très relative, encore parcourue de frissons mélodiques liquides et agités. À nouveau l'esquisse d'un troisième Philip Glass ? L'étude vingt, magistrale, n'en annonce-t-elle pas aussi la venue ? Accents déchirants, beauté voilée, quelque part du côté de Schumann et Scriabine, un Glass moins éblouissant, libéré de lui-même en un sens. 

   Précisons que Nicolas Horvath a choisi de quasiment enchaîner les vingt études, nous plongeant dans ce monde dynamique et mouvementé par une coulée pianistique ample, loin de certaines interprétations compassées, trop sages (et l'on en trouve sur la toile !! Je ne citerai personne...). Oui, Glass est un hyper lyrique, un romantique dans le meilleur sens du terme ! Que la prise de son du Steinway est formidable : on est dans le flux ! Que le livret trilingue (anglais, français, allemand) est vraiment intéressant : on y trouve notamment le parcours de Glass retracé à grands traits, les réflexions et analyses du pianiste sur ce qu'il joue et la manière dont il le joue, bref ce qu'on ne trouve plus que trop rarement.

   Un second disque déterminant pour changer l'image de Philip Glass qui, à bientôt quatre-vingt ans, montre qu'on peut être à la fois populaire, voire (ô le gros mot !) commercial, et l'un des plus grands compositeurs d'aujourd'hui, en perpétuelle métamorphose, insaisissable, pour notre plus grand plaisir.

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Glassworlds 2, paru début septembre 2015 chez Grand Piano / Naxos / 20 pistes / 83 minutes environ.

Pour aller plus loin :

- au sujet du premier disque Glassworlds 1

(Liens mis à jour + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 9 août 2021)

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Publié le 6 Avril 2015

Philip Glass - Glassworlds 1 / Nicolas Horvath, piano

   Le pianiste Nicolas Horvath, interprète de Liszt et lauréat de nombreux prix internationaux, se lance dans une édition complète, sur le label Grand Piano de Naxos, des œuvres pour piano de Philip Glass, première édition du genre qui comportera des inédits, des transcriptions. C'est la suite logique d'une longue fréquentation du compositeur américain, émaillée de concerts fleuves, de marathons. Il jouera d'ailleurs ce vendredi 3 avril l'intégrale de ses Études pour piano, donnée pour la première fois à Carnegie hall le 9 janvier de cette année.

   Glassworlds 1 augure bien de ce travail formidable. Le livret, trilingue (anglais / français / allemand), offre un modèle de ce que l'on peut attendre d'une édition "matérielle" de la musique. Assorti d'une présentation du parcours musical de Philip Glass par Frank K. DeWald, il contient aussi un long texte passionnant de Nicolas Horvath, qui revient sur sa découverte et son goût pour la musique de Philip et commente chacun des morceaux du premier volume. On ne saurait rêver mieux, et tant pis pour le critique, chroniqueur qui se demande ce qu'il pourait bien ajouter. Pour l'instant, je me contente de prélever ce qu'il dit de sa rencontre avec la musique de Philip Glass : « Je me souviens encore aujourd'hui de l'effet que me fit sa musique : cette impression nocturne de flotter sur les eaux tranquilles d'un lac sous un ciel étoilé. » La scène est romantique à souhait, à l'image de la musique telle que la conçoivent et le compositeur et Nicolas, qui écrit ceci : « Par opposition à la nature apparemment simple et austère de ses partitions (et aux lectures plutôt prudentes enregistrées par certains de ses premiers défenseurs), le compositeur avait une approche très libre - quasi improvisée - voire romantique. La partition n'étant que le schéma directeur d'un univers dense, profond mais sensible et qui ne demande qu'à être découvert, tout comme une luxuriante forêt traversée par de minces sentiers balisés. » (C'est moi qui souligne) Tout est dit, nous sommes prévenus : le pianiste nous entraîne loin des lectures sages, compassées qui réduisent Philip Glass à une icône de la musique minimaliste ou répétitive. Primat à la sensibilité sur la technique compositionnelle !

   C'est bien ce que l'on entend dès Opening (1981), une des plus célèbres compositions de Glass, plus contrasté m'a-t-il semblé que sous les doigts du compositeur, avec des moments de retenue très beaux joints à une incroyable délicatesse de toucher, une grâce brumeuse,  des montées plus intenses. Une très belle relecture, qui nous prépare à l'étonnante "Orphée Suite", arrangement par Paul Barnes pour le piano d'extraits de l'opéra de chambre en deux actes Orphée d'après Jean Cocteau. Rappelons au passage que Philip Glass a terminé ses études musicales à Paris, sous la houlette de Nadia Boulanger, qu'il parle assez bien français et connaît notre culture, d'où son intérêt pour Cocteau, auquel il consacrera une trilogie. Étonnante, cette suite ? Elle combine ragtime tumultueux et mélodies envoûtantes comme celle de "Journey to the Undeworld", vision infernale à la beauté trouble, très inattendue dans l'œuvre de Philip Glass. Même "Orphée and the Princess", a priori plus dans les clichés glassiens, est aérée par le toucher précis qui fait ressortir chaque note, par l'énergie des montées, la profondeur des moments graves. Toute la suite est transfigurée, portée par un charme irréel qui se résoud en une atmosphère vaporeuse traversée d'élans émouvants dans la dernière section "Orphée's Bedroom Reprise".

      Dreaming Awake, pièce de 2003, si elle ressemble plus à du Glass, surprend par une fougue étincelante, une inventivité mélodique que j'ai pu entendre sous les doigts du compositeur interprétant quelques unes de ses récentes Études pour piano lors de son récent concert à La Comète de Châlons en Champagne. Ce premier enregistrement mondial est superbe, brassant les émotions les plus diverses avec une grande palette de couleurs au long des quatre mouvements, surprenant par un savant jeu de reprises et d'amplifications.

   Le programme se termine avec une longue pièce de plus de trente minutes datant de 1968, How Now, représentative du style répétitif de cette période, mais également influencée par les ragas indiens, les gamelans indonésiens. Le piano s'y fait percussif, le jeu roulant des notes produit des champs harmoniques denses, d'où son côté hypnotique. Le piano devient portique de cloches folles agitées par le vent. Musique extraordinaire, qui suscitera sans doute de violents rejets de la part de ceux qui voudraient n'y entendre que le retour du même, tout à fait enthousiasmante pour les autres, dont je suis, ravis d'être transportés dans cette série d'escalades vertigineuses, dans cette houle illuminée, ce martèlement pourtant assez différent de celui d'un Charlemagne Palestine. C'est un chemin violent d'ascèse, un dépouillement, sans cesse à reprendre pour atteindre l'extase.

   Un disque magistral, éblouissant, fort intelligemment conçu de manière non chronologique pour présenter toute la diversité de l'œuvre de Philip Glass, ce jeune compositeur de plus de 87 ans. La rencontre d'un immense compositeur et d'un non moins immense pianiste, qu'on se le dise ! Sans oublier le piano, un Fazioli, à la musicalité exceptionnelle !!

Philip Glass - Glassworlds 1 / Nicolas Horvath, piano

(Liens mis à jour + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 8 août 2021)

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Publié le 5 Janvier 2015

Nicolas Horvath interprète Philip Glass à Carnegie Hall

   Le pianiste Nicolas Horvath sera en concert ce 9 janvier 2015 à Carnegie Hall pour une intégrale des études pour piano de Philip Glass ainsi qu'une série de pièces en hommage à Glass ou au pianiste, la plupart en création mondiale. Voici le programme détaillé de ce concert qui s'annonce mémorable comme toutes les belles folies que nous concocte le fougueux Nicolas : soyez à l'heure, les bienheureux, ce sera à 20h.

Philip GLASS : Etudes Book I (1 to 10)
Jeroen van VEEN (hol) : Hommage for Philip Glass (dedicated to me – national premiere)
Frédérick MARTIN (fr) : Glass in Mirror (dedicated to me – national premiere)
Konstastin YASKOV (by) : Moonlight Sonatina of Philip Glass (world premiere)
Stéphane DELPLACE (fr) : Hommage à Glass (national premiere)
William SUSMAN (usa) : 1937 (dedicated to me – national premiere)
Andre Vindu BANGAMBULA (cd) : Homage to P. Glass (world premiere)
Eve BEGLARIAN (usa) : Enough Holes (world premiere)
Tom SORA (de) : Glassplitter (WP)
Tom CHIU (tw): laboerets version 2.0 (dedicated to me – national premiere)
Sergio CERVETTI (uy) : Intergalactic Tango (dedicated to me – world premiere)
Régis CAMPO (fr) : Smiley ! (dedicated to me – world premiere)
Jaan RÄÄTS (ee) : Prelüüd op.128 (world premiere)

Entracte

Bil SMITH (usa): Delinquent Spirit of a Drowned City (dedicated to me – national premiere)
Paul WEHAGE (usa) : Early Morning:New York Skyline (dedicated to me – national premiere)
Michael Vincent WALLER (usa) : Pasticcio per meno è più (dedicated to me – world premiere)
Alp DURMAZ (tr) : Bustling (world premiere)
Gilad HOCHMAN (il) : Broken Glass (dedicated to me – national premiere)
Ehsan SABOOHI (ira) : Where is the friend’s house? (dedicated to me – national premiere)
Lawrence BALL (uk) : Glass Ball Game (dedicated to me – world premiere)
Paul A. EPSTEIN (usa) : Changes 6.1 (dedicated to me – world premiere)
Alvin CURRAN (usa) : The Glass Octave (world premiere)
Michael BLAKE (za) : Shard (dedicated to me – world premiere)
Victoria Vita POLEVA (ukr) : NULL (national premiere)
Mamoru FUJIEDA (jp) : Gamelan Cherry (national premiere)
Philip GLASS : Etudes Book II (11 to 20)

Pour couronner le tout, commencera en mars la publication du premier volume de la série "Glassworlds" chez Naxos !

 

  Bil SMITH (usa):

Nicolas Horvath interprète Philip Glass à Carnegie Hall

Nicolas Horvath en concert.

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Rédigé par Dionys

Publié dans #Le piano sans peur, #Philip Glass, #Minimalisme et alentours

Publié le 13 Décembre 2009

Bruce Brubaker (2), défricheur des musiques d'aujourd'hui.
  Bruce Brubaker fait décidément partie de ces rares pianistes qui n'ont peur de rien, qui vont jusqu'au bout de leurs enthousiasmes musicaux. Sur hope street tunnel blues, sorti en 2007, il propose un programme qui alterne des œuvres de Philip Glass et d'Alvin Curran. Si le premier a gagné les faveurs du grand public, le second reste dans l'ombre alors qu'il est l'un des compositeurs majeurs de ce temps. De Glass, Bruce interprète une transcription de "Knee Play 4", un fragment de l'opéra Einstein on the beach", "Wichita Vortex sutra", deux morceaux typiques de ce minimaliste au lyrisme fluide, le célébrissime "Opening",  un morceau que je ne me lasse pas de réécouter, mais aussi une des très belles études pour piano, la cinquième, intériorisée et frémissante, un versant moins grand public de ce compositeur prolifique. D'Alvin Curran, Bruce retient le morceau éponyme, prodigieux, une machine à accumuler de l'énergie avant de se résoudre en fleuve irrésistible, en vrai blues lancinant. Et il se lance à nouveau dans ce monument pour piano, "Inner cities", dont il interprète cette fois, après la première pièce sur son disque précédent, la seconde, tout aussi radicale dans sa beauté  lumineuse et désolée, dans son obstinée recherche d'absolu. Plus de vingt minutes si loin des vaines agitations, si près du son originel et ultime à la fois...

Paru en 2007 chez Arabesque Recordings / 6 plages / 60 minutes environ
Bruce Brubaker (2), défricheur des musiques d'aujourd'hui.

   Fidèle à Philip Glass, Bruce Brubaker a sorti voici quelques mois un nouvel opus où il interprète ses six études dans la version originale de 1994. À écouter pour ne pas enfermer le minimaliste dans des clichés injustes ! Comme dans ses disques précédents, le pianiste en profite pour entraîner ses auditeurs vers de nouveaux continents. Cette fois,  vers un autre de ses compatriotes, né en 1943, William Duckworth, compositeur, professeur de musique à l'université de Bucknell, à qui l'on doit un superbe cycle pour piano, The Time curve preludes (1977-1978), que certains considèrent comme l'une des premières manifestations du postminimalisme. En tout cas, un grand cycle, dont nous n'avons ici que le premier livre de 12 préludes. Alors, un Debussy du postminimalisme ? Assez juste pour quelques pièces vaporeuses, lignes impalpables et clapotements. Il y a aussi du John Cage - compositeur qu'il a beaucoup étudié, dans ces pièces imprévisibles, discrètement envoûtantes, je pense au sixième prélude, carillon en boucles serrées, l'une des pièces où le titre d'ensemble se comprend le mieux, l'auditeur pris dans les filets du temps courbe. Comme des miniatures d'une extraordinaire fraîcheur, labiles, des truites qui s'échappent dans les éclaboussures, éblouissantes et rieuses.

Time Curve (Musique de Philip Glass et William Duckworth)

Paru en 2009 chez Arabesque Recordings / 18 plages / 70 minutes environ
Pour aller plus loin
- mon article précédent consacré au pianiste, le 19 novembre.
- une vidéo où Bruce montre comment il "prépare" son piano pour jouer la musique de William Duckworth.

(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 27 janvier 2021)

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