Publié le 26 Mars 2010
(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 3 février 2021)
Inactuelles, musiques singulières
Chronique des musiques singulières : contemporaines, électroniques, expérimentales, du monde parfois. Entre actualité et inactualité, prendre le temps des musiques différentes, non-formatées...
Publié le 26 Mars 2010
(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 3 février 2021)
Publié le 23 Mars 2010
Ingram Marshall, Morton Feldman, Giacinto Scelsi, John Adams, Brian Eno : cinq compositeurs fétiches de ce blog...présents sur la bande-son du formidable dernier film de Martin Scorsese, Shutter Island. Scénario éblouissant, distribution impeccable, pour un film en hommage à tant de classiques de l'histoire du cinéma que Scorcese a montrés à son équipe pendant le tournage, je n'y reviens pas. À ceux qu'il cite volontiers, il convient d'ajouter Shining de Stanley Kubrick pour au moins trois raisons. L'arrivée sur l'île et l'entrée dans le pénitencier-hôpital, filmées en travelling dramatisés par la musique, avec en particulier un travelling sans doute en hélicoptère, comme pour la traversée des espaces déserts avant l'hôtel dans le film de Kubrick. Ensuite, le choix des lieux : l'hôtel et Ashecliffe sont des prisons-labyrinthes isolées du reste du monde, propices à un fantastique "gothique" assez appuyé. Enfin, la bande-son soignée, qui fait appel à des compositeurs contemporains, voilà qui est tout à fait kubrickien, et je m'en réjouis.
Pour aller plus loin
- deux articles consacrés dans ce blog à Ingram Marshall : September Canons et Dark Waters.
- Dvd en vente sur bandcamp
(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 3 février 2021)
Publié le 18 Mars 2010
(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 3 février 2021)
Publié le 11 Mars 2010
Cinquième album du duo stéphanois, Burning Before Sunset marque un tournant vers un dub ambient sobre et dense, moins démonstratif. L'importante place accordée au poète Black Sifichi, véritable troisième membre de fait, contribue à cette intériorisation de la musique : sa diction grave et envoûtante apporte une solennité impressionnante à l'ensemble. Il y a quelque chose de sépulcral dans cet album hanté, qui s'ouvre sur "There is A Wind", grande draperie dramatique aux claviers scandée par le beat lent et implacable de la percussion et la déclamation sourde de Sifichi, comme une cérémonie d'envoûtement. Du véritable dub gothique, une plongée dans des eaux troubles avec "Ignore", clapotis aquatiques et claviers obstinés pour un crescendo incandescent. "Only Lost In The Sound", fausse déambulation pastorale rythmée par des cloches, prend des tournures de descente aux Enfers, les synthétiseurs se font sirènes cuivrées qui tournoient dans le soir épaissi comme plomb fondu. Sifichi incante "Smoke In Our Minds", dub minimal hypnotique, avant que ne se lèvent les esprits des morts dans "Bull's Ass" traversé de ululements plaintifs, de mugissements.
"Don't Ask Me Why"est une litanie autour du moi, "I", et de ses métamorphoses : atmosphère grinçante de supplices, sourdine survoltée. Des nappes de synthétiseurs nous apaisent, c'est "Possibility Of Love", cette clameur qui monte, et puis l'attente oppressante, les mots-dits si sombres du récit d'amour, du Iggy Pop étouffé, la plaine dévastée par une mélancolie poignante, oppressée par les nuages lourds. Une harpe surgit sur "Plain White Butterfly", court poème qui s'ouvre sur l'évocation de la mort d'Erik Satie, véritable fenêtre ouverte et si vite refermée, échappée dans la blancheur recherchée par delà le crépuscule enflammé. Cela a suffi pour nous décaler très loin, le paysage s'aère un peu, la harpe s'attarde sur les horizons désolés, se profile au loin "The Tower To Eternity". La voix de Sifichi se dédouble, le dub se fait statique et plus sourd, la harpe voltige encore sur la fin. Retour à l'ampleur splendide du premier titre avec "My Legs, My Arms, My Mind & My Brain", dub baudelairien de l'être brûlé par ses impasses. Crépitements, cycles cristallins de la harpe (du synthé-harpe) pour "Invisible Click" qui prépare le terrain de "Hope Of Utopia", l'horizon s'éclaire, des enfants s'interpellent, le monde existera encore ?
Un disque très cohérent, beau parcours qui nous sera peut-être plus intelligible si le disque nous fournit les paroles des poèmes, parfois difficiles à saisir au vol.
Paru en mars 2010 chez Jarring Effects / Discograph /12 titres / 47 minutes.
Pour aller plus loin
- la chronique de Short Cuts, leur album précédent.
- le très beau site perso de Black Sifichi
- album en écoute et en vente sur bandcamp :
(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 3 février 2021)
Publié le 5 Mars 2010
Nous sommes au cœur du labyrinthe, dans la chambre secrète des strates à demi détruites pour un "Nocturnorama" de près de 16 minutes. Plus rien ne peut nous atteindre, une torpeur nous saisit, les veux airs défilent et s'évanouissent, repassent dans une trame distendue ponctuée de quelques notes d'un clavier voilé, étouffé. Le temps s'est arrêté, peut-être, ou ne cesse de revenir dans un éternel retour nietzschéen. Séducteur redoutable, dont les effluves surannés dispensent "Le Sex-Appeal de l'anorganique", pot-pourri d'un absolu mauvais goût, aux relents militaro sentimentaux. "Dialektisches Bild" : « Dans l'image dialectique, l'autrefois d'une période déterminée est en même temps l'autrefois de toujours. » (voir l'illustration ci-dessus). Fin du pittoresque, l'autrefois est un, amalgame de toutes les strates temporelles, tout s'y dépose dans l'indifférenciation : le morceau associe boucles minimalistes des claviers et rythmiques ferroviaires, nuages électroniques en couches sonores à peine ourlées, superbe travail, un autre grand moment de cet album !! "Ultime Parataxe", troisième et dernier des interludes grinçants qui attaquent la nostalgie comme un acide salvateur, débouche sur une "Valse" engrossée par des échantillons qui en font un champ de tir de l'expérimentation sonore. Place au deuxième "Crystal Palace" dont les mille prismes piègent l'autrefois-présent dans un carrousel étourdissant toujours sur le point de se briser. Comment faut-il alors comprendre le "Necessary Angel"qui clôt l'album ? Ange de la tourmente et de l'envol, de la disparition programmée, recouvert d'épaisses couches de particules sonores qui le voilent et l'étouffent...
Avec ce quatrième album solo, Pierre-Yves Macé s'affirme comme l'un des
musiciens les plus passionnants de notre temps. Il faut mériter ce disque déroutant à première écoute, si attachant ensuite qu'il semble faire partie de nous-mêmes, comme s'il nous avait révélé quelques-uns des secrets du temps. Un disque quasiment initiatique, parce qu'il a l'immense mérite de nous apprendre à écouter dans les interstices, sous la peau craquelée des années. La pochette et le livret si soignés, si éclairants, sont tout à l'honneur du label Brocoli.
Paru en 2009 chez brocoli / 16 plages / Plus de 70 minutes
Pour aller plus loin
- un article antérieur consacré à Circulations, sorti chez Sub Rosa en 2005.
(Nouvelle mise en page + ajout d'illustrations visuelles et sonores le 31 janvier 2021)