Kalylivedub / Pierre-Yves Macé : Expérimentations électroniques dans des univers parallèles.

Publié le 27 Mars 2008

Kalylivedub / Pierre-Yves Macé : Expérimentations électroniques dans des univers parallèles.
Kalylivedub / Pierre-Yves Macé : Expérimentations électroniques dans des univers parallèles.
   Le rapprochement paraîtra osé, voire incongru à certains. Quoi de commun entre un groupe de dub-rock  et un compositeur comme Pierre-Yves Macé ? Je suis certain que le second ne serait pas choqué, car il est nourri de rock et rêve d'un croisement entre rock expérimental, la musique ambiante et la musique contemporaine répétitive. Tous les deux travaillent sur le rapport entre l'instrumental et l'électronique, accordent à la scène et au concert une place primordiale, laissent une place à l'improvisation, font interférer échantillonneurs, séquenceurs et instruments acoustiques pour brouiller les pistes, inventer des territoires de traverse.
 
Faisant suite à On stage (cf. article du 19 mars 2007), ce cinquième opus, Fragments, confirme la maturité d'un groupe majeur de la scène dub française. On retrouve la puissance rythmique des compositions, le son épais et dense, volontiers sombre et dramatique, la fièvre d'ambiances saturées, mais aussi des climats lentement déployés . Magnetic dust, le quatrième titre, est ainsi un voyage hypnotique dans un mystérieux paysage intergalactique peuplé de voix étranges, de vagues de claviers parasités et, vers la fin, de nappes de cordes inattendues. Le groupe navigue entre rock industriel et reggae, musique expérimentale et effervescence psychédélique. Uzul Prod, projet initié par Stéphane Bernard aka Uzul (l'un de nos cinq compères, l'homme des machines) ou Dalëk ne sont pas éloignés de ce soleil noir sidérant, qui revendique parmi ses influences Amon Tobin, Portishead ou encore Massive Attack.
  

  

    Quand on l'interroge sur ses goûts, Pierre-Yves Macé mentionne ausi bien Gavin Bryars, Steve Reich, du côté des minimalistes, que Brian Eno, Harold Budd, pour l'ambiance calme des textures acoustiques et synthétiques, ou encore des expérimentateurs iconoclastes comme John Cage, Alvin Curran, ou le guitariste rock Fred Frith, l'incroyable groupe de post-rock progressif (je viens d'inventer une catégorie !)This Heat. Pas étonnant que Pierre-Yves Macé se retrouve sur Inactuelles... Né en 1980, le compositeur a trois disques à son actif. Circulations est le second, paru chez Sub Rosa en 2005. C'est une longue pièce en quatre mouvements qui mettent chacun un instrument en concurrence avec une bande magnétique. Les percussions, la guitare électrique, la harpe et la clarinette dialoguent avec un environnement électro-acoustique dans lequel on retrouve un échantillonnage de l'instrument enregistré, traité et modifié, selon un principe de redoublement : se créent ainsi des circulations, des courants, des jeux d'écho, dans une grande mobilité et une impression d'improvisation réjouissante. Ici, tout est sous le signe de la fluidité, du passage, de la création permanente, avec des surgissements miraculeux, des sources douces au milieu de chaos, des frémissements et des battements, des convulsions et des tendresses fragiles, de  l'assourdissant et de l'imperceptible. Plus on écoute ce disque, plus on l'aime pour son inventivité, ses beautés fulgurantes et imprévues, et pour tout dire sa liberté souveraine hors des sentiers tracés, à la recherche de la musique prête à sourdre à chaque seconde. Circulations est un disque essentiel pour découvrir la musique d'aujourd'hui et pour échapper à l'abrutissement et au formatage.
Pour aller plus loin :
- le
site du compositeur.
- un entretien vidéo avec Pierre-Yves Macé, qui sera à Reims jeudi 3 avril à 19h 30 au Centre Saint-Exupéry, dans le cadre d'une soirée Live Electronics organisée par Césaré, Centre national de la création musicale.
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