Publié le 13 Mai 2025

MM Works - Park

    Park : je n'oublie pas ce disque, que j'ai failli laisser passer....

    MM Works is un duo de Copenhague constitué par Mathias Lystbaek , qui a sorti deux disques en 2023 et 2024 sous le nom de Circa Alto, et Mads Lassen, batteur dans plusieurs groupes. Enregistré au printemps, alors que le froid s'estompait, Park se situe dans un entre-deux, entre hiver et printemps, froid et chaud, obscurité et lumière qui revient, l'enregistrement en studio captant les fluctuations météorologiques. Un côté acoustique, avec flûte, guitare et batterie, et une touche électronique légère.

   "Bloom"(Floraison) ouvre l'album, tout fleurissement de flûte ensorceleuse, comme des appels dans la forêt. La batterie souligne d'un friselis léger, puis de ponctuations plus fortes, mais toujours aérées, ce bouquet mélodieux, cette envolée lumineuse que la guitare cisèle doucement. Oui, c'est un parc que cette musique, un parc en effervescence printanière.

  Sur "Day  01" (titre 2), la guitare est plus en avant, dessinant des volutes, des griffonnages, que la batterie et la basse ancrent dans une ombre moelleuse. Le titre éponyme est un chant d'une délicatesse pudique, flûte et guitare enveloppés d'un voile ombré, la batterie sculptant la dévotion palpable des deux musiciens. "Mist" (titre 4) reprend la veine du premier titre. C'est la brume des appels, des lents envoûtements, boucles de guitare, phrases suaves, fusées de lumière soudain dans le buissonnement un peu irréel des massifs sonores en lente transformation. "Cry" a un charme verlainien délicieux : la musique flotte dans une gaze, rien en elle ne pèse ni ne pose, elle est suggestive. Griffures de guitare dans un brouillard de bourdons fragiles. Des ombres passent dans un parc agité par une brise à peine sensible. Si ce sont des pleurs, ils sont éthérés, diaphanes, pleurs du paradis perdu. Titre vraiment magnifique !

   Les deux derniers titres respirent la même ambiance feutrée, authentiquement merveilleuse. La musique du duo sort des contes et légendes nordiques les plus évanescents, des histoires de naissances et d'apparitions dans cette période de transition qu'est le printemps. Invites et invocations parées d'une aura mystérieuse, que les frémissements et frappes si légères de la batterie tirent à peine d'une rêverie intemporelle.

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Le parc des enchantements et des sortilèges : une musique ambiante au charme voluptueux !

Paru début décembre 2024 chez 12k (New-York, États-Unis) / 7 plages / 43 minutes

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Rédigé par Dionys

Publié dans #Musiques Ambiantes - Électroniques

Publié le 10 Mai 2025

Roland Schappert - C'ant see the Rebel

   Fondateur du label r-ecords.com en 2022, Roland Schapper développe une musique électronique légère, aérée, mélodieuse. Can't see the Rebel est le troisième disque de la maison.

   Avec le premier titre éponyme, ça commence presque comme du Steve Reich, avec une ligne rapide de grappes de notes, sauf qu'une ligne de basse vient souligner le flux caracolant de notes perlées. Roland Schapper construit une musique d'une vivacité gracieuse, dansante. C'est un rêve bondissant se perdant dans les hauteurs, nullement plombé par le rythme implacable.

"Vibe-Coda", toujours dansant, plonge dans les vibrations, les respirations, les chuintements, comme en apnée au-dessus de massifs rocheux, mais il se reventile en aigus, plane avec des contorsions minimales. "Play Again", avec son piano réverbéré, décrit des arabesques précieuses, puis prend un ton plus grave sur un fond de froissements. La pièce se fracture de micro silences, danse dans le vide,  s'illumine de métallisations lointaines, sculptée avec minutie.

Le puissant "Ehrlicher Mond" (titre 4) pilonne à partir d'une ligne scintillante et cabriolante de synthétiseur : la lune honnête du titre, n'est-ce pas cette irréalité folle qui se saisit de la pièce, musique pour un conte de E.T.A. Hoffmann ? Plus proche de la techno, "Kombipakt" se vaporise en multiples plans froissés, d'une densité rentrée, intériorisée. Il rayonne d'une sourde intensité, d'une royale concision, avec une fin joyeusement déglinguée. "Ehrlicher Mond solo" termine l'album par un festival de jeux sonores synthétiques. La matérialité du son est au cœur de l'écriture : les textures s'épaississent, s'irisent, elles diffusent leurs vibrations dans une joie sans mélange.

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L'air de rien, un disque subtil, sculpté dans une ambiance d'euphorie limpide. De la musique électronique vive, non dénuée d'humour.

Paru en mai 2025 chez r-ecords (Cologne, Allemagne) / 6 plages / 27 minutes

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Publié le 2 Mai 2025

Mark Springer + Neil Tennant + Sacconi Quartet - Sleep of Reason

   Inspirés par la série d'estampes des Caprices de Francisco de Goya le compositeur, pianiste et interprète britannique Mark Springer, fondateur du groupe Rip, Rig and Panic, et Neil Tennant, chanteur du duo britannique Pet Shop Boys, ont composé une vaste suite de chambre pour quatuor, quintette avec voix et piano solo. Neil Tennant a écrit les paroles pour l'eau-forte Le Sommeil de la raison engendre des monstres , gravure 43 de la série, en se voulant fidèle à la dimension sardonique, onirique, d'œuvres qui donnaient de leur époque un portrait satirique cruel de la politique, de la corruption et du double langage du pouvoir établi à travers ses cauchemars. Les monstres de Goya, le parolier a cru les repérer avec leur ego grotesque sur les réseaux sociaux où ils hurlent en laissant derrière eux une traînée de ruines...

Quatuor à cordes : le Sacconi Quartet (Ben Hancox, violon / Hannah Dawson, violon / Robin Ashwell, alto / Carra Berridge, violoncelle) // rejoints par Neil Tennant, voix, pour le quintette.

Au piano : Mark Springer

Treize caprices pour aimer la Déraison...  

   Le premier cd comporte le quintette en six mouvements, puis le quatuor en trois parties. Le quintette se situe dans la tradition des chansons de Hans Eisler et Kurt Weill composées pour le dramaturge Bertolt Brecht. Parolier et unique chanteur, Neil Tennant restitue la gouaille, la mordante ironie des chansons de cabaret, la quatrième partie ayant d'ailleurs un titre allemand, "Schmutzig" (Sale), mais aussi la dimension onirique des tableaux fantastiques. Mélodies caressantes, fragments de comptines, refrains obsédants, c'est une musique populaire au sens le plus noble, que l'on pourrait aussi rattacher à des musiciens grecs comme Mikis Theodorakis ou Manos Hadjidakis. Au total, grâce à la magnifique diction et au chant souple et ensorceleur de Tennant - on pense parfois en l'écoutant à Edward Ka-Spell des Legendary Pink Dots !, c'est un enchantement. 

   Le quatuor qui suit transpose pour cordes seules les mélodies et motifs du quintette. Qu'est-ce que le sommeil de la raison, sinon le retour doucement enivrant de mélodies suaves, le développement de motifs allègres ou rêveurs selon le moment du jour, les trois mouvements étant titrés "Morn" /"Noon"/"Night" ? On s'abîme dans une langueur capiteuse, le temps s'alentit, la nuit nous prend dans ses filets. Mark Springer redonne au quatuor ses pouvoirs de rêverie grâce à une écriture légère, fine, vaporeuse. Les mélodies coulent, nous enveloppent dans des rets aux mailles subtiles...

   La surprise pour moi, ce fut le deuxième cd. Une immense suite pour piano solo en quatre mouvements : presque une heure ! D'abord un parfum post-Satie irrésistible : une suite de miniatures sautillantes enchaînées sur "Break", alanguies parfois par la main gauche, et qui se mettent à caresser le ciel pour mieux rebondir en pluie de notes fines. "Flight" (plus de vingt minutes) s'enrichit de développements à la Philip Glass. La musique s'envole en effet dans de beaux tournoiements graves, caracole et frétille, se suspend, rêve, se lance dans de longues boucles aérées de passages féériques. Jamais l'intérêt ne faiblit, tant la composition est d'une incroyable variété, nous emporte dans son mouvement animé.

   Avec "Dark" (piste 3 du cd2), on retrouve le côté Satie, poussé au brillant, quasi frénétique, et s'enfonçant dans de noires béances, comme si l'aile de la folie passait, avant de s'abandonner et d'être repris par des airs fantasques. Glass revient en force au début du bouillonnant "Moon" : boucles puissantes, éparpillées en gouttelettes miroitantes, bousculades, cette lune n'est pas de tout repos. Elle entraîne certes au rêve, mais navigue en eaux troublantes, agitées, parcourues de frissons mélodiques récurrents. Mark Springer écrit une musique qui épouse les soubresauts d'une conscience prise aux sortilèges séduisants de la Nuit...

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Un double album tout à fait étonnant, associant un quintette avec voix, un quatuor et une suite pour piano solo de toute beauté. La musique, d'un néo-classicisme post-minimaliste, est constamment mélodieuse, étincelante de verve et de fantaisie nimbée de grâce irréelle.

Paru le 25 avril 2025 chez Sub Rosa (Bruxelles, Belgique) / 2 cds / 13 plages / 1 heure et 43 minutes environ

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Publié le 29 Avril 2025

Alex Zethson / Nikos Veliotis - CRYO

  Le violoncelliste grec Nikos Veliotis et le pianiste suédois Alex Zethson se sont rencontrés à Athènes au célèbre magasin de disques-galerie d'Art Underflow. Le violoncelliste avait été invité pour la première partie du concert du groupe Goran Kajfes Tropiques dont le pianiste fait partie. Tous les deux étant impliqués dans de nombreux projets liés à la musique électronique, au rock et aux musiques expérimentales, ils ont enregistré CRYO dans la foulée au studio Artracks de la même ville. Le disque est publié par le label Thanatosis Produktion que le pianiste  a fondé et dirige depuis 2016.

Zethson Veliotis par © Michell Zethson

Zethson Veliotis par © Michell Zethson

Aux sombres rivages de l'Insondable  

   Le disque comprend deux longues pièces d'une vingtaine de minutes. Deux maelstroms immersifs se déplacent et se modifient lentement, le piano en cascades de boucles très graves, le violoncelle en longs raclements bourdonnants. La masse sonore tournoie, nous sommes comme au centre d'un amas orageux d'harmoniques miroitantes. Dans la deuxième moitié de la première partie, nous plongeons dans un gouffre, au royaume des graves extrêmes, des vagues de bourdons profonds.

Piano et Violoncelle sur glace...  

"CRYO 2" poursuit la descente aux enfers grondants. L'atmosphère s'alourdit, saturée de fantômes sonores. Que le disque ait été optimisé par Mell Detmer, qui a travaillé pour des groupes de Drone Metal comme Earth n'est pas indifférent...C'est un flux minimaliste d'une grandiose noirceur, le violoncelle tel un frelon énorme tournant autour du piano enveloppé de chapes de résonances, se débattant pour échapper au froid absolu (rappelons que la racine «cryo-» signifie froid).

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La musique formidable des abysses !

Paru le 14 mars 2025 chez Thanatosis Produktion (Stockholm, Suède) / 2 plages / 40 minutes environ

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Publié le 21 Avril 2025

Ben Bertrand - Relic Radiation

Aux envoûtants Royaumes de la clarinette basse

   La clarinette basse en tant qu'instrument d'avant-garde : depuis son premier album solo en 2018, le clarinettiste et compositeur belge Ben Bertrand crée un univers sonore unique où fusionnent références au passé et extrême modernité des musiques électroniques, de nombreuses machines s'ajoutant à ses clarinettes (basse ou non). En utilisant boucles et pédales d'effet, les sons de sa clarinette deviennent électroniques, fusionnent avec elle. Il fait entendre sa musique dans toute l'Europe, a sorti plusieurs disques notamment chez Stroom. Il a collaboré avec Christina Vantzou sur l'album N°5, publié chez Kranky.

Ben Bertrand, sa clarinette...et le reste !

Ben Bertrand, sa clarinette...et le reste !

Reliques mélancoliques...

Ça commence comme par un tambourinement, accompagné de froissement sourds, puis déferlent les sons de clarinette..."Microwave Background" attaque : musique massive de boucles, de vagues, de tremblements, sur un fond qui semble d'orgue, des sons filés. Pluie de particules dans le cosmos, traversées proches d'astéroïdes. Dieu quelle musique formidable, à frémir !. "Event Horizon" (titre 2), c'est presque huit minutes d'un lamento labyrinthique, entre les bourdons de clarinette et des aigus lancinants. Alors s'élèvent des voix intérieures d'une sublime mélancolie, une polyphonie bouleversante. L'une des plus belles musiques qu'il m'ait été donné d'entendre, lente et envoûtante somptuosité de draperies ondulantes...

   Le court "GW 190905", c'est du Steve Reich à grande vitesse, animé d'une pulsation irrésistible. Un bataillon de clarinettes à l'assaut griffonne à grandes traînées la nuit ! "Stereo A" (titre 4) nous embarque sur un étrange vaisseau dont sortent des mélodies ensorceleuses, ce serait pour une nouvelle d'Edgar Poe, là-bas près de pôles magnétiques, au plus près du noir absolu. "Big Bounce", c'est la danse des clarinettes basses, magnifiques, grondantes, au milieu d'irisations, de capsules traçantes aiguës...

   "Stereo B" (titre 6) est le titre le plus éthéré de l'album, tout en miroitements, opalescences tremblées jusqu'à l'entrée de la clarinette basse, au son ample, d'un grave magnifique, qui vient planer sur le fond radieux. Le mystérieux "GW 150721" termine l'album avec sa mélodie d'une déchirante beauté, sorte de respiration multiple s'éployant dans un soir d'abîme.

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Magistral. Une splendeur. Un des très grands disques de 2025 !

Paru le 15 avril 2025 chez Stroom (Ostende, Belgique) / 7 plages / 36 minutes environ

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Publié le 15 Avril 2025

Cléo T. - Des Forêts et des Rêves

   J'écoute en boucle depuis hier le dernier disque de la chanteuse, poétesse et compositrice Cleo T. Il ne sera pas question ici du livre et des poèmes  publiés conjointement. La musicienne a collaboré avec John Parish (PJ Harvey), Robert Wyatt ou encore Alex Somers (Sigur Rós). Elle participe aussi à des projets de musique contemporaine, théâtraux ou cinématographiques. Contrairement à ses albums précédents, elle ne chante pas, vocalise sur une trame musicale de cinquante-cinq minutes environ. Avec piano amplifié comme une guitare de pop rêveuse, thérémine et voix, la musique n'est pas sans évoquer les compositions de Harold Budd (1936 - 2020) : une ambiante éthérée, aux amples développements flottants.

Cléo T. par © Yuta Arima

Cléo T. par © Yuta Arima

« Et là, les formes, les sueurs,
les chevelures et les yeux, flottant. »

Les titres poétiques suggèrent des mots que la musique fait entendre grâce à des paysages sonores baignant dans un halo tremblant de réverbérations. Quelques chants d'oiseaux et comptines enfantines ponctuent brièvement des compositions d'inspiration minimalistes aux boucles charmeuses. Cette musique est lumière, élan, joie, légèreté, loin des notes d'intention "engagées"  ou théoriques. Elle foisonne, bourgeonne, « des fleurs plein les veines » (titre 4), une voix masculine accompagnant pour une fois celle de Cléo, c'est la musique des merveilleux nuages du poème de Baudelaire, une musique pour se perdre dans la forêt profonde des rêves, comme le souligne le titre de l'album. Le titre 5 éponyme est une marche extatique au milieu de voix diaphanes, de gazouillis, du fin tintement du thérémine, de pleurs peut-être, et la voix de soprano soulève cette progression majestueuse, appuyée sur un ample bourdon. C'est une musique en état de grâce, d'une beauté miraculeuse, à tomber à genoux... [ Je préfère la version longue du disque, presque huit minutes, à l'essentiel edit des plates-formes réduit à un peu plus de trois ! ]

« O douceurs, ô monde, ô musique ! »  

Toute la suite a un parfum rimbaldien. Le titre VII "Qu'as-tu vu ?" n'évoque-t-il pas l'expérience d'un Voyant qui "ensauvage (son) cœur" (VIII) ? Le monde vibre, le piano se fraie un chemin dans un dédale répétitif d'une sublime mélancolie et l'orage monte, la pluie mouille la forêt.  "Soudain le ciel" (titre 9) caractérise une vision. Tout s'assombrit, le piano devient grave. Ce titre splendidement buddien n'est qu'un frémissement de piano et de voix, la montée au firmament d'une musique vaporisée. Alors "L'obscurité a disparu" (X), « et les pierreries regardèrent, et les ailes se levèrent sans bruit » écrivait le jeune Arthur dans Aube...

« J’avancerai en rêve

Vers tout ce que je suis.

Tout ce que j’ai été.

Et des fleurs

Plein les veines

Mon corps fait continent. »

écrit Cléo T.

 

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Une musique d'un lyrisme limpide et doucement enivrant. Une source vive de bonheur !

Nota : les titres en rouge sont des extraits du poème Barbare extrait des Illuminations d'Arthur Rimbaud, 

 

Paru le 10 avril 2025 chez Moonflowers (en Charente, France) / 10 plages / 55 minutes environ. La musique est aussi accessible avec un QR code se trouvant dans le livre carnet qui retrace un processus de création pluriel : composition musicale et poétique, et performance scénique aux Éditions de l'Entrevers

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- sur le site de Moonflowers

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Publié le 11 Avril 2025

Glenn Kotche - Mobile [réécoute ]

[J'inaugure une série de très courts articles consacrés à des réécoutes consécutives à des plongées dans ma discothèque personnelle...]

   Paru en 2006 sur l'excellent label américain Nonesuch (la maison de Steve Reich !), Mobile est le premier album du percussionniste Glenn Kotche. D'ailleurs inspiré notamment par Steve Reich et la sculpture mobile, le musicien utilise vibraphone, kalimba (appelé aussi mbira, lamellophone d'origine subsaharienne), batterie...et même piano. Un disque bouillonnant, d'une fraîcheur incroyable, entre minimalisme, techno, musiques traditionnelles et rock expérimental !

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Publié le 10 Avril 2025

Erik Klinga - Elusive Shimmer

Premier volet d'une trilogie publiée par le label de Stockholm ThanatosisElusive Shimmer est aussi le premier album du compositeur suédois Erik Klinga. Actif dans différents groupes en tant que batteur, il est diplômé en composition électroacoustique et se passionne pour le Buchla 200, le Roland Juno 60 et d'autres synthétiseurs analogiques qui sont au cœur de ce premier album avec un orgue et quelques enregistrements de terrain. Pas de percussion, sauf dans le dernier titre où intervient une grosse caisse...

Erik Klinga par © Moa Gustafsson Sondergaard

Erik Klinga par © Moa Gustafsson Sondergaard

Scintillement insaisissable...

   Les premières mesures m'ont fait penser à Pantha Du Prince ! Le synthétiseur cristallin sonnant comme des clochettes... L'une des traductions françaises du titre de l'album me semble bien rendre compte de l'effet musical recherché. C'est une musique gorgée de lumières, de scintillements, aérienne, légère. Le second titre "Iridescence" confirme cette orientation. Les synthétiseurs font naître des paysages contrastés en perpétuelle métamorphose, impulsent sans le secours d'aucune percussion une rythmique allègre. Les fondus sont parcourus de réfractions multiples, tout glisse dans une euphorie doucement extatique. 

   "Luminous Rays" baigne littéralement dans des rayonnements diaphanes contrastant avec de moelleux bourdons. Erik Klinga joue du Buchla et des autres synthétiseurs en poète attentif à la beauté des arrangements sonores. Les synthétiseurs deviennent des oiseaux au vol harmonieux traversant des nuages éthérés. Les textures aigües en premier ou arrière-plan ont une tendance au carillonnement, à l'étincellement furtif, tant cette musique se tient au bord d'une lumière supérieure, dont elle est informée au point d'en garder un émouvant frémissement, à la fin du très beau "Parallax" par exemple (titre 5), de lui emprunter un courant alternatif, une impulsion sur le magnifique "Rarefaction" où tout se dissout dans le radieux de l'orgue enveloppant.

   La dimension mystique de cette musique éclate dans "Ascension" (titre 7), au début paré d'une lueur archangélique. Les sons synthétiques tenus et glissants s'apparentent à des mantras soutenus par des bourdons parcourus de voix supra-humaines, de miroitements. On monte des marches resplendissantes pour se perdre dans des chatoiements spectraux avant de connaître une aube triomphale, soulignée par l'entrée de la grosse caisse dans la dernière pièce, "Dawn Chorus", grosse caisse dont je me passais fort bien dans les morceaux précédents...

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Un disque éblouissant qui ravira les amateurs du Buchla, et, au-delà, tous ceux qui cherchent un peu de beauté dans ce monde...

Paru fin janvier 2025 chez Thanatosis Produktion (Stockholm, Suède) / 8 plages / 48 minutes environ

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