Dominique A / Gravenhurst / Fink : La chanson sans fard, probablement.

Publié le 23 Novembre 2007

Dominique A / Gravenhurst / Fink : La chanson sans fard, probablement.
   Pour une fois, la chanson. Plaisir des  voix, des mots, des mélodies simples et belles. Trois disques récents raviront les amateurs. D'abord le disque en public de Dominique A, que je découvre (je l'avoue). Si l'on excepte le premier titre, L'Amour, qui ressasse un peu trop les mêmes paroles, et le dernier, Empty white blues, à mon sens inutilement en anglais, restent  treize titres magnifiques d'émotion, de pudeur, d'énergie aussi. Car les guitares électriques se déchaînent parfois, zébrées d'éclats cuivrés, succédant à des moments intériorisés, où la voix murmure presque, fragile. Ecoutez le poignant Pour la peau (en écoute ici), qui évoque l'amour comme une cérémonie religieuse qui "l'a rendue toute chose" avant de célébrer jusqu'à la frénésie l'embrasement du désir. Ou encore Marina Tsvétaïéva, hommage à la poétesse russe scandé sur une rythmique obsédante à la Léonard Cohen dans Songs of Love and Hate : "Marina, Marina, tu le sais ici tout / brûle", avec cette façon si particulière qu'a Dominique de segmenter l'énoncé  en en détachant la fin et en l'accentuant, ou, ailleurs, de désarticuler la phrase en faisant attendre la suite. L'alliance réussie de textes, de vrais textes quoi, littéraires (pour le meilleur !), et d'un accompagnement rock intelligent, à la Sonic Youth qui sert à merveille cette voix délicate et vibrante, limpide comme une source surgie de très loin. Tout est déjà dans la pochette, sublime : l'homme de Music Hall, "qui avance parmi les dunes" et "chemine en se balançant", est un Stalker sorti du film d'Andréi Tarkovski, l'homme qui se détourne pour se fondre dans le sépia, c'est lui qui suit sa route, les yeux fixés sur l'intérieur du coeur et les échappées de l'âme.
 
Dominique A / Gravenhurst / Fink : La chanson sans fard, probablement.

   Cinquième album de Gravenhurst, groupe de Bristol mené par Nick Talbot,  The Western Lands ne présente guère qu'un seul défaut, sa relative brièveté, à peine plus de quarante minutes. Entouré du batteur Dave Collingwood, du bassiste Robin Allender et du second guitariste Alex Wilkins, l'anglais chante avec bonheur entre folk et rock sur des mélodies à l'évidente beauté. Comment oublier Song among the pine, ballade folk à la mélancolie sereine, ou She dances, au début électrifié d'une grande élégance acérée, auquel succède un air léger et tournoyant peu à peu envahi par les guitares rageuses ? La voix aérienne de Nick baigne l'album d'une lumière discrètement psychédélique, tant on songerait parfois à Syd Barrett. Tout est juste, sans esbroufe, serti d'accompagnements délicats. Plaisir des guitares électriques jouées en finesse, de la batterie qui offre ses battements avec une retenue pas si fréquente, de la basse presque voluptueuse. Un petit bijou...
 

Dominique A / Gravenhurst / Fink : La chanson sans fard, probablement.

  Le DJ Finian Greenall, alias Fink, a abandonné ses platines au profit de la guitare. Après Biscuits for breakfast, première surprise folk, il récidive avec Distance and time. Avec un batteur, un bassiste, sa guitare et sa voix caressante et insinuante, il égrène des chansons simples, qui prennent leur temps. Et on revient l'écouter pour comprendre comment il a pu nous accrocher, l'air de rien. De quoi surprendre sur le label électro Ninja tune, non ?
L'émission du 18 novembre a inséré ces trois artistes entre Robert Wyatt et Slow six, déjà chroniqués ici.

Sur nos forces motrices de Dominique A est paru en 2007 chez Cinq 7 Wagram Music

The Western Lands de Gravenhurst  est paru en 2007 chez Warp Records

Distance and Time de Fink est paru en 2007 chez Ninja Tunes

 

(Nouvelle mise en page + illustrations sonores )

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